mardi 15 juillet 2014

L'investissement que je ne ferai jamais

Récemment, vous vous en rappelez peut-être, j'ai reçu un héritage et donc réussi à avoir un certain "lousse" financier. Je l'ai aussitôt investi pour diminuer notre seule dette (notre hypothèque), ce qui me permet maintenant d'envisager quelques années d'écriture à temps plein.

Cela dit, alors que je m'apprêtais à prendre cette décision, une amie m'a suggéré d'acheter un logement que je pourrais louer. Ça, disait-elle, ce serait un investissement à long terme, quelque chose qui me rapporterait plus que le 3% d'intérêt que je payais sur mon prêt hypothécaire.

Bon, premièrement, les taux d'intérêt, ils risquent de monter. Deuxièmement, en même temps que je réduis ma dette, ma maison prend de la valeur. Troisièmement, je me fous des chiffres : ne plus verser la moitié de notre revenu familial annuel à mon banquier, c'est vraiment bénéfique pour ma tranquillité d'esprit!

Ces considérations mises à part, s'il y a un investissement que je ne ferai jamais, c'est bien dans un logement locatif.

Mon chéri et moi avons été locataires pendant plusieurs années. Sept années dans le même logement en fait, un minuscule demi-sous-sol. Au début, l'appartement avait du vécu (genre le prélard de la cuisine avait des trous et on voyait qu'il y avait eu des couches successives), mais après qu'on l'ait bien frotté, repeint, etc, il était à peu près habitable (malgré le fait que lorsqu'il ventait fort, mes rideaux battaient au vent même si les fenêtres étaient fermées).

Mais pendant les cinq premières années où on a vécu là, le proprio n'a jamais fait de rénovations, malgré nos demandes. Évidemment, parce qu'il ne changeait rien, on refusait les augmentations de loyer. Finalement, il a fallu qu'on lui envoie une mise en demeure parce que la porte-patio était tellement pourrie que je retrouvais non seulement des bibittes d'humidité et des araignées, mais aussi des vers de terre sur le plancher de mon logement!!! Peu de temps après, le proprio a décidé de remplacer le prélard de notre cuisine (y'était temps). Sauf qu'il a engagé une gang broche à foin qui a passé l'ancien prélard à la sableuse industrielle. Sans me prévenir des conséquences à attendre. Je vous laisse imaginer de quoi ça peut avoir l'air un trois et demi envahi par la poussière (toxique) de sept couches de vinyle passées à la sableuse. Y'en avait jusque dans les plis des draps rangés dans la lingerie. Mettons que le proprio a reçu une autre mise en demeure!

Bref, j'ai connu quelques mauvaises expériences en tant que locataire. Mais d'un autre côté, je regarde les réglementations, ainsi que ce que les associations de locataires réclament et ça me décourage complètement de devenir propriétaire de loyer.

C'est vrai que l'augmentation de loyer possible, en regard des sommes investies en rénovation, n'est vraiment pas élevée. Je comprends que c'est pour éviter des chocs tarifaires à des locataires qui n'avaient pas prévu ça. Mais si les proprios ne récupèrent pas leur investissement, ça les encourage à laisser les logements se détériorer. Et maintenir en état un bâtiment qui a de l'âge, ben la propriétaire que je suis désormais sait que ça coûte cher (quand on vient de changer les fenêtres, faut commencer à économiser pour refaire la toiture).

Deuxièmement, devoir dévoiler le loyer du locataire d'avant, je comprends que là encore ça sert à éviter des hausses trop élevées au moment du changement de locataire. Mais quand le proprio gardait un loyer volontairement bas pour accommoder un locataire fiable et de longue date, il devrait ensuite pouvoir se remettre au prix du marché. Surtout que le locataire qui signe le nouveau bail, il a la possibilité de magasiner son prix, de le négocier... mais bon, je comprends qu'il faut quand même un mécanisme de contrôle, parce que y'a des proprios qui abusent.

Troisièmement, il est illégal au Québec d'exiger un dépôt de sécurité pour couvrir d'éventuels dommages au logement. Là encore, je comprends la logique : on ne veut pas que des locataires à faible revenu, incapables d'amasser une sommes conséquente en dépôt de sécurité, ne puissent plus se louer de logement. En plus, on s'inquiète de l'honnêteté des propriétaires : ils pourraient prendre n'importe quel prétexte pour refuser de rendre le dépôt.

Cela dit, pour avoir vu comment certains locataires traitent leur logis (et là je ne parle même pas de gens qui font des trous dans les murs ou invitent les coquerelles à s'installer, juste de gens qui ne lavent jamais un mur ou ne prennent pas la peine de prévenir le proprio quand un robinet coule "juste un peu"), je trouve que le dépôt de sécurité est un concept qui mériterait d'être réfléchi. Ou, à la limite, qui pourrait être demandé dans certaines circonstances. Par exemple, si le logement vient tout juste d'être abondamment rénové ou encore si le locataire ne peut pas présenter de référence ou s'il a un gros chien.

D'ailleurs, parler de chien m'amène à la quatrième raison, abondamment débattue ces jours-ci, qui fait que je ne serai jamais propriétaire de logements à loyer. Voyez-vous, les associations de locataires désirent maintenant forcer les propriétaires à accepter les animaux de compagnie. Encore là, je comprends la logique : les restrictions sur les animaux de compagnie font que beaucoup de gens abandonnent leurs animaux au moment d'un déménagement. C'est cruel pour l'animal. Parce que non, un chien c'est pas l'équivalent d'une chaise, c'est un être vivant, il mérite d'être protégé.

Mais un chien, c'est aussi un être vivant qui peut pisser (ou pire) sur un tapis, rayer les planchers, gruger les portes d'armoire, aboyer à toute heure du jour, etc. Je comprends les proprios qui n'en veulent pas dans leurs logements. De même que je comprends ceux qui acceptent les chats, mais en limitent le nombre (j'ai connu une fille qui vivait avec huit chats dans un trois et demi, j'vous laisse imaginer l'odeur de litière qui flottait en permanence chez elle... ainsi que chez ses voisins immédiats!).

Bref, dans cette histoire de propriétaires et de locataires, je ne peux pas dire que j'ai des opinions arrêtées. Je comprends les positions des uns et des autres.

Et vous, vous en pensez quoi de tout ça?

11 commentaires:

Annie Bacon a dit…

Lorsqu'on est passé de locataire à propriétaire, on s'est posé la même question, puisqu'il y avait la possibilité d'acheter un triplex et de louer les autres étages. mais quelques histoires d'horreur d'amis ayant de bâtisses locatives nous en ont passé le goût! De ce que je comprend, dans la plupart des cas, ça va très bien, et c'est payant... mais quand ça va mal, c'est vraiment une catastrophe pas possible!

Gen a dit…

@Annie : Moi ce que j'ai entendu (d'amis proprios de logements) c'est que si tu veux entretenir tes logements correctement, ce n'est pas si payant que ça, car l'investissement est difficile à récupérer.

Claude Lamarche a dit…

Ma famille a été propriétaire d'une maison: notre entreprise en bas et deux loyers en haut. Mon frère surtout s'en occupait. Sauf une fois, je me suis rendue à la cour de justice pour obtenir justice contre un locataire. On a gagné mais ensuite, va donc courir après (avec un huissier qu'il faut payer) pour te faire rembourser les sommes dues. Ma belle-soeur sont propriétaires de mère en filles et nous racontent plus souvent leurs difficultés que leurs bonheurs.
Ces deux seuls exemples m'ont suffi à être certaine que jamais oh! grand jamais je ne serai propriétaire de loyers. J'ai bien assez d'entretenir ma propre maison.

Nomadesse a dit…

Oh non merci. Trop de troubles, d'un bord comme de l'autre. Je suis copropriétaire de condo, je trouve que c'est un bon mix entre l'arrangement entre adultes, la nécessité de prendre soin de la bâtisse et la propriété. Mais j'envisage seulement de louer si jamais on allait vivre à l'étranger et qu'on avait les moyens de garder le condo ici. Ce qui n'est pas garanti du tout. Sinon, ça ne m'intéresse pas.

J'ai vu la situation des propriétaires de près, c'est pas vargeux. Mais j'ai aussi vu la situation des locataires de près aussi (ayant vécu à peu près la même chose que toi) et ce n'est pas vargeux non plus.

Au Japon, c'est terrible: on a dû payer une caution équivalent à deux mois de loyer, en plus d'un "cadeau" équivalent à un mois de notre loyer + le premier loyer. Le premier mois, on a donc payé notre montant multiplié par quatre. On est resté un an, quand on a quitté, c'était hyper propre, rien de brisé pantoute et on n'a jamais revu la couleur de notre caution (1200$, ç'aurait été bienvenu). Et il paraît que c'est une pratique courante au Japon: il y a tellement peu de logements et ça coûte tellement cher que les proprios ont le gros bout du bâton et ils font ce qu'ils veulent. Il semble que ce soit pas mal la même chose en Europe... Alors j'avoue que je tends vers les moyens pour faciliter l'accès au logement aux plus jeunes (et plus pauvres bien souvent) parce que je ne tiens pas à avoir deux "jeunes" de 35 ans à la maison plus tard, si ça devenait aussi pire qu'en Europe ou en Asie! ;) Oh oh oh!

myr_heille a dit…

Mon frère est propriétaire d'une trentaine de portes et il nous suggérait fortement d'acheter un duplex/triplex quand on magasinait notre maison. Ça ne m'intéressait pas pantoute, je suis un peu sauvage quand je suis chez moi et je voulais rien savoir d'avoir des inconnus dans ma maison qui pourrait ruiner l'appart.

Finalement, on a acheté une maison avec une entrée séparée au sous-sol. On avait dans l'idée de louer des chambres, alors on a fait une petite cuisine. Un jour, grand bonheur: le meilleur ami de Dom voudrait déménager, est-ce qu'on voudrait lui louer l'appartement du sous-sol? Ils sont restés deux ans (ça a remboursé entièrement les travaux de cuisine en bas, et ça payait une bonne partie des factures, même si on leur chargeait pas mal moins cher qu'on aurait pu). Quand ils sont partis, on pensait récupérer le sous-sol, mais finalement, un autre ami voulait louer aussi. C'est vraiment le meilleur des mondes. On n'est pas inquiets pour notre maison (même que ça nous rassure de savoir qu'il y a quelqu'un de confiance quand on part une fin de semaine) et on fait un peu d'argent (on leur charge pas cher, comme je disais, mais c'est quand même très bienvenu). Quand notre locataire actuel voudra partir, à moins qu'un autre ami veuille venir, on louera pas.

Bref, je pense que c'est un très bon investissement, si tu peux te trouver des amis qui veulent habiter avec toi ;)

Gen a dit…

@ClaudeL : En effet, mon expérience dans le domaine juridique m'a montrée que c'est pas évident de récupérer les sommes dues, même en cas de jugement favorable. J'aurais pu mettre ça aussi dans la liste de mes raisons pour ne jamais devenir propriétaire de logements!

@Nomadesse : Oui, j'avais entendu parler d'endroits (notamment le Japon) où les dépôts de sécurité ne sont jamais récupérés. Mais j'ai des cousins qui ont vécu en France et ils n'ont jamais eu de problème à récupérer leur dépôt... sauf à Paris (même problème de pénurie de logements).

Sans en venir à ce point, y'aurait sans doute moyen de réintroduire le dépôt de sécurité dans certaines circonstances (genre : t'as un gros chien ou les planchers viennent d'être refaits, etc).

Gen a dit…

@myr_heille : Ah, en effet, là vous avez le meilleur des deux mondes je pense! Vous pouvez choisir des locataires que vous connaissez, vous n'avez pas absolument besoin de louer et un jour vous aurez probablement une jeune adulte qui sera très heureuse d'occuper le logement du sous-sol!

Tiens, j'y pense, si jamais votre locataire actuel s'en va, il vous restera la possibilité d'offrir le sous-sol comme "résidence d'écrivain" pour des périodes de quelques mois! ;)

Une femme libre a dit…

J'ai acheté une maison
à revenus quand j'avais 30ans. J 'habitais le bas avec cour. Il faut considérer la location comme une job et à ce titre, il y a évidemment du travail impliqué. Une perte de liberté aussi. Faut s'assurer que quelqu'un prenne la relève quand on part. J'ai eu de mauvais locataires mais surtout des bons. Avec du recul, cette maison
à revenus à été le meilleur investissement que j'ai fait. Ma maison
s'est payée rapidement et j 'ai fait un énorme profit à la revente.

Gen a dit…

@Femme libre : Tant mieux si ça c'est bien passé pour vous. Mais les chances de faire un énorme profit en revendant sont minces de nos jours par contre.

Une femme libre a dit…

Évidemment, autres temps, autres moeurs. De nos jours, les maisons sont très chères en partant et de moins en moins de jeunes personnes arrivent à s'en payer une. Socialement, c'est cependant un réel problème si plus personne ne s'intéresse à l'immobilier. Les pauvres ont besoin de logements accessibles pas trop chers, les listes d'attente pour les hlm sont de plusieurs années, il n'y a plus de nouvelles coopératives d'habitation qui se créent et les maisons de chambre sont rarissimes. Les itinérants sont de plus en plus nombreux.

Gen a dit…

Je ne pense pas qu'on est au stade où plus personne ne s'intéresse à l'immobilier (comme je dis, une amie m'a proposé de faire comme elle et d'acheter un condo à relouer). Sauf que mon idéal dans la vie n'est pas d'avoir deux hypothèques. Si j'avais suivi son conseil, j'aurais eu quatre jobs : ma job à temps plein que j'aurais dû garder, écrivaine, maman et administratrice de logement.

Euh... c'est pas pour moi, merci!