vendredi 22 septembre 2023

Bye bye précarité

J'ai arrêté de travailler comme salariée en avril 2014. La puce était bien à l'abri dans ma bedaine et je voulais pouvoir écrire quelques mois à temps plein avant son arrivée. 

Je ne savais pas combien de temps je resterais hors du marché "traditionnel" du travail. J'avais des fonds pour tenir trois ans. Avec mon mari qui avait un bon emploi, il n'y aurait pas de stress financier même si mes revenus fluctuaient. Il serait là, pensais-je, pour garder la puce lors des événements, salons, congrès, animations... Je me suis donc lancée. 

J'ai écrit (quoique toujours moins que j'aurais voulu), j'ai publié, j'ai reçu des prix, des bourses, rédigé des critiques, j'ai fait des directions littéraires, révisé des traductions, ai été traduite moi-même, j'ai animé des ateliers, des rencontres scolaires, j'ai co-dirigé la collection VLB Imaginaire mise sur pied avec Mathieu Lauzon (ce qui a impliqué de plonger dans des slush piles, concevoir des couvertures, réviser des mises en page)... Bref, j'ai touché à tout!

Nous sommes presque dix ans plus tard. Je suis séparée depuis quatre ans. J'ai toujours les fonds pour tenir trois ans. Je vis de ma plume (et surtout des tâches connexes), mais... 

Mais, récemment, la conciliation travail-création-famille commençait à m'épuiser. Certains jours avaient un goût amer. 

Voyez-vous, je suis à un point de ma carrière d'écrivaine où on me propose de belles opportunités lucratives (des semaines de tournée scolaire ou des résidences de trois à six mois)... mais je dois y renoncer. Je ne peux pas mettre en pause tous mes contrats. Et puis, comme je suis le seul parent responsable de ma fille, qui la garderait tout ce temps? Même les salons et les lancements, ça demande une logistique importante. Et à chaque confinement, rhume de la puce, panne d'électricité de l'école, tempête de neige, alouette... je dois replanifier mes horaires, prioriser les contrats payants et donc sacrifier mon temps d'écriture. Conclusion : en théorie je suis libre de mon temps, mais en pratique je ne peux pas en tirer avantage... alors pourquoi m'acharner?  

Quand j'ai réfléchi dernièrement à mes nouveaux "objectifs pour dans cinq ans", le premier qui m'est venu était le suivant : je voulais un poste en édition. Continuer à faire les mêmes tâches, mais de manière stable. Sans jongler huit dates de tombée concurrentes et devoir envoyer des rappels de facture et m'inquiéter du renouvellement de mes mandats. Un poste qui me permettrait d'avoir enfin des vrais temps libres et de les prendre pour écrire sans me sentir coupable. Je n'étais pas prête à accepter n'importe quoi, évidemment...

J'ai trouvé plus vite que prévu. Et mieux que j'aurais jamais osé imaginer! (Je vous dis pas où tout de suite, chuttt, c'est encore un secret.)

Pour l'hyper-indépendante que je suis, quitter le travail autonome, c'est un un peu un deuil... mais quand je réalise tout le stress que ça m'enlève, je devine que ce sera aussi une renaissance.

Vous n'avez pas fini de me lire! ;)