lundi 19 octobre 2015

J'ai des idées géniales, mais...

Je sais pas si ça vous arrive souvent, mais moi je reçois au moins trois ou quatre fois par an des demandes du genre :

"J'ai des super bonnes idées, mais pas le talent, le temps, ni l'intérêt pour les écrire, alors je me demande si vous seriez intéressée à les écrire à ma place. J'ai pas d'argent pour vous payer, mais comme ce sont de bonnes idées, vous allez faire de l'argent comme d'habitude, et peut-être même plus, une fois que ce sera publié."

Je sais que ces gens-là ne pensent pas à mal. Qu'ils ne veulent pas nous insulter. Qu'ils n'ont probablement pas lu ce qu'on a publié. Qu'ils ne connaissent rien du milieu littéraire, ni même de la démarche d'écriture. Qu'ils ne comprennent pas qu'une idée, c'est bien, mais que ce n'est que le début d'un très long processus. Qu'ils ne savent pas que pour se lancer dans ledit processus, il faut vraiment que l'idée nous obsède, parce que le chèque de paie à la toute fin est ridicule. Et que leur idée à eux a très peu de chance de nous obséder.

Parce qu'elle est cliché. C'est normal : tout a été écrit. Une idée toute nue sonne toujours cliché. Il faut beaucoup de talent narratif pour l'habiller de nouveaux atours et la rendre intéressante.

Or, ceux qui nous écrivent pour nous parler de leur idée supposément géniale n'ont pas grand chance de développer ce talent. Parce qu'ils ne lisent pas assez et regardent trop de film.

La preuve : ils pensent que les écrivains se cherchent des idées.

Or, selon mon expérience, l'écrivain en panne d'idée, c'est une bibitte cinématographique. Dans la vraie vie, les écrivains cherchent du temps pour écrire les idées qu'ils ont déjà. Et de l'argent pour vivre pendant qu'ils le font.

Pfffff! Est-ce que c'est moi qui est fondamentalement méchante ou est-ce que des fois c'est dur d'être diplomate avec ces gens-là?

21 commentaires:

Nomadesse a dit…

On m'a proposé une idée une fois, et ça venait d'un éditeur! Alors tiens: des fois, les gens se disent qu'on écrit sur commande... Alors que c'est tellement peu inspirant.

Je suis comme toi: je manque de temps, mais pas d'idées!

Prospéryne a dit…

Une idée toute nue, cliché? Je n'y avais jamais pensé, mais maintenant que tu le dis, c'est vrai. Et en effet, ça prend le talent de l'auteur pour rendre ça intéressant.

myr_heille a dit…

Ben moi, c'est le contraire, j'haïrais pas écrire un livre mais j'ai pas d'idées. Bizarre hein? Dominic comprend pas pantoute quand je lui dis ça.

M a dit…

Moi je donne des prix. d'un coup que quelqu'un dise "ah ouin, ok, vla le chèque". Je donne des prix élevés, au cas. ;-)

Isabelle Lauzon a dit…

Ah bien tiens! Non, on ne me fait pas ce coup-là. À moi, on me demande des trucs pour être publié...

OK, ça doit être mon aura de "Mère Teresa" qui veut ça! ;)

Ou alors, le fait que j'indique clairement sur mon blogue que je suis mère de famille et que je travaille. Les gens sont peut-être gênés de me demander... (lolol)

Daniel Sernin a dit…

Moi, cette proposition m'est surtout venue de la famille élargie (tantes, cousines...). Et ça s'articulait pas mal comme tu le détailles, avec en plus ce sous-entendu: en fournissant les idées, elles assumaient déjà une généreuse part du travail.
Comprenez que les discussions ne se sont pas rendues assez loin pour que je prenne connaissance des «idées» ni que j'énonce un prix -- fictif ou pas -- pour mes services.
Quant à l'éditeur évoqué par Nomadesse, il s'agit évidemment de Brûlé, donc c'est notoirement, et de tout temps, le modus operandi.

idmuse a dit…

Un écrivain n'a pas assez d'une vie pour écrire toutes ses idées, qu'on se le dise.
Et oui, j'avoue que l'idée doit m'obséder aussi.

Gen a dit…

@Nomadesse : Je me suis déjà fait proposer aussi une idée par un éditeur (et oui, c'était Brûlé, mais j'ai entendu dire que ce n'est pas le seul à agir ainsi) ça aurait pu être intéressant, parce que l'idée n'était pas trop détaillée (quasiment pas en fait) et qu'il me restait de la place pour être créative, mais j'ai préféré travailler sur mes propres projets. Et avec un auteur éditeur.

@Prospéryne : De là le "Tout a été écrit, mais pas par moi" qu'Élisabeth nous répète souvent! ;)

@myr_heille : Je seconde Dominic : hein? Ça se peut "ne pas avoir d'idée"? Cela dit, prendre garde à toi : si jamais tu mets la main sur UNE idée et que tu commences à écrire un livre, tu risques de découvrir que les idées, c'est comme les microbes : ça se promène en gang! :p

@M : Je donne des prix moi aussi (modulé en fonction de l'intérêt de l'idée si expliquée), sauf quand la personne insiste beaucoup sur le fait de ne pas avoir d'argent. Auquel cas, je lui donne un estimé de ce que son "idée de génie" risque de rapporter. Calcul facile à faire : 10% d'un livre à prix moyen (15$) qui connaîtrait des ventes moyennes (500), ça donne 750$ pour 3 à 6 mois de travail. Des fois, après avoir lu ça, les gens s'excusent! :p

@Isa : Je recevais des demandes comme ça même avant d'avoir lâché ma job. Ptêt parce que des fois je parle de "commande" reçues. Les gens ont pas l'air de comprendre qu'une "commande", c'est une longueur de texte, un thème pis une date. Cela dit, on me demande aussi des trucs pour se faire publier. (Quand je réponds "écrire", je sens que ça déçoit! ;p)

@Daniel : Oh, j'y ai bien sûr eu droit dans ma famille (avec le sous-entendu que les idées fournies me permettraient de faire plus d'argent que ce que je gagnais avec mes pauvres idées à moi), mais de la part d'inconnus, par courriel, c'est quand même un autre degré.

@idmuse : Si l'idée ne nous obsède pas, on court le risque de se dire en cours de route "j'suis-tu vraiment en train de faire tout ça pour 750$?" (voir le calcul proposé à M)

Anonyme a dit…

Bonjour à tous,

Une question pour vous qui écrivez depuis longtemps : Comment faites-vous pour finir vos histoires?

J’explique : on s’entend qu’avoir des idées n’est pas la difficulté, mais plutôt amener ces idées à maturité, satisfaction, et « habillement ».

Concrètement : Est-ce que vous vous concentrez sur un seul texte, et attendez de l’avoir terminé pour passer à un autre? Ou vous travaillez sur plusieurs textes en parallèle?

Marianne

Gen a dit…

@Mariane : Selon mon expérience, le plus dur, c'est de finir le premier texte. Ensuite, ça devient plus facile.

Alors oui, je te conseillerais de te concentrer sur un seul texte et de le finir, même si ce n'est pas entièrement satisfaisant, plutôt que d'en commencer d'autres.

Qui trop embrasse mal étreint! ;)

WikiPA a dit…

Ouin, content de n'être encore qu'un « jeune » auteur! ;)

Quoique de mon côté, ce sont les sollicitations de révision et de correction qui continuent d'arriver de manière sporadique. Et après m'être fait avoir une fois avec la cousine d'une amie qui ne m'a jamais payé, j'ai tendance à être pas mal plus prudent avant de dire oui...

Mais sinon, je suis d'accord qu'on a déjà pas assez de temps pour concrétiser (et faire publier!) nos propres idées, s'il fallait en plus qu'on s'occupe de celles des autres!

Quoique, il y a des fois où je rêve de me partir une PME d'écrivain public. J'ai toujours aimé écrire, peu importe la nature des textes. C'est toujours moi qu'on charge pour les éloges funèbres et les toasts d'anniversaires dans la famille (heureusement, il n'y a pas eu de décès depuis un bout, parce que je DÉTESTE écrire ce genre de chose...) Mais de là à écrire une nouvelle ou un roman avec l'idée d'un autre... Je sais pas, j'éprouve le même malaise qu'avec l'idée des mères-porteuses...

Si je dois revendiquer la paternité d'un texte, j'aimerais bien qu'il soit le mien de A à Z...

Bref, réflexion intéressante ce billet! ;)

Gen a dit…

@WikiPA : Bonne idée la PME d'écrivains publics. Si tu pars ça, j'embarque! ;)

Parce que mon problème principal avec le fait d'écrire des idées des autres, c'est le bénévolat que ça implique!

lucdagenais a dit…

@wikipa et Gen: Ce qu’il faudrait pour ces gens-là, c’est une maison d’édition style « Éditions de la première chance » ou les gens paieraient non seulement pour la publication (révision, impression, etc.) de leurs livres, mais aussi pour l’écriture complète de ceux-ci à partir de leur idée « géniale »… ;-D

Anonyme a dit…

Merci Geneviève pour ta réponse, c'est encourageant! Le premier texte est écrit, dieu(x) merci!
Marianne

Gen a dit…

@luc : En effet, c'est ça qu'il leur faudrait. Tant qu'à payer 5000$ pour l'impression et tout, qu'est-ce que ce serait un 10 000$ de plus pour l'écriture? :p

@Marianne : De rien! :)

Nomadesse a dit…

Ah! Moi ce n'était pas Brûlé! Donc il y a d'autres éditeurs qui font ça aussi. Moi aussi, l'idée était générale, ça aurait pu être intéressant, j'avais un brouillon... Mais finalement, je n'avais pas la motivation.

Gen a dit…

@Nomadesse : Merde, la coutume se répand! :S

idmuse a dit…

Ce sera ma première année d'imposition l'an prochain, j'ai fait plus que ça, mais avec l'impôt par-dessus mon salaire... tk, je ne veux pas y penser avant date.

Gen a dit…

@idmuse : Je fais plus que ça aussi, enfin la plupart du temps, mais c'est un chiffre moyen pour de la littérature générale.

idmuse a dit…

je veux juste faire du déni jusqu'à la dernière minute :P

Gen a dit…

Bien sûr : si on en faisait pas tous de manière pathologique, j'pense qu'on écrirait pas! :p