Vickie Gendreau est décédée samedi. Je sais pas si vous vous souvenez d'elle. C'était la fille, 24 ans, ex-danseuse nue, qui, se découvrant atteinte d'une tumeur au cerveau inopérable, avait écrit un livre, "Testament" publié chez Le Quartanier. On en a beaucoup parlé l'an dernier.
Je ne la connais pas personnellement, je ne l'ai même pas encore lue. Pourtant, son histoire m'avait énormément touchée. Elle était née en 1989. Plus jeune que ma petite soeur. Une kid! Bon, vingt fois plus âgée que moi pour que ce qui était des expériences de vie... mais quand même! D'habitude, on ne se découvre pas condamnée à son âge. On l'est depuis son enfance si a eu le malheur de naître sous une mauvaise étoile et on a grandi avec l'ombre de la mort. Ou alors on va vivre encore une décennie ou deux avant que nos mauvaises habitudes nous rattrappent et nous achèvent.
Mais non, Vickie avait tiré le mauvais numéro. Du jour au lendemain, au milieu d'une vie qui semblait normale, la condamnation était tombée.
Alors, elle a fait quoi cette jeune femme?
Elle s'est lancée dans l'écriture à corps perdu. Elle a écrit un roman. Puis un deuxième, dont elle ne verra même pas la version imprimée.
En lisant son histoire, la première fois, je m'étais rappelé une scène. À l'hôpital, en 2010, j'attendais qu'on m'opère, qu'on arrête l'hémorragie interne causée par une grossesse ectopique. Vincent était avec moi, on avait peur tous les deux... Alors on a parlé des pires sujets possibles, comme pour les exorciser. De ce que je voulais qu'il décide si jamais les choses ne tournaient pas bien. Pas d'acharnement thérapeutique. Je te l'ai jamais dit, mais je voudrais être incinérée...
Et, surtout, surtout, arrange-toi pour terminer Hanaken.
En lisant son histoire, j'ai eu l'impression de comprendre Vickie comme j'ai rarement compris de gens dans ma vie. Parce que devant l'ombre de la mort, elle a eu le même réflexe que moi, celui de dire : "Emporte-moi s'il le faut, mais je veux laisser des mots derrière moi".
Tu as réussi, Vickie, on te lira encore longtemps.
9 commentaires:
Tu m'apprends cette nouvelle ce matin, ça me jette par terre. J'ai lu son premier roman et j'en ai fait une critique, je l'ai vu en entrevue au dernier salon du livre. Moi qui croyais qu'elle était à peu près sortie d'affaire... Moi aussi je comprend ce besoin viscéral de laisser quelque chose derrière soi, et malgré tout ce qu'elle a vécu je suis contente pour elle qu'elle ait réussi. Je me souviendrai d'elle.
@Hélène : J'pense qu'on espérait tous qu'elle s'en sortirait. Mais oui, au moins on peut dire qu'elle a réussi son objectif. Non pas un livre, mais deux.
Merci pour ce petit texte.
@Le Mercenaire : C'est le moins que je pouvais faire. Mes condoléances à toi et à tous ceux qui l'avez connue.
Très beau texte. J'ai le même réflexe. La suite de ma trilogie est résumée en synopsis. Mon frère cadet, dont je suis très proche, sait que s'il venait à m'arriver quelque chose, je souhaite qu'il écrive le reste de la saga avec l'aide de Francine Pelletier.
"Emporte-moi s'il le faut, mais je veux laisser des mots derrière moi".
Très belle phrase. Je crois qu'elle résume le sentiment de beaucoup, beaucoup d'écrivains.
Elle était passée à "Tout le monde en parle". Une jeune femme touchante.
@Sébastien : En effet, je pense que ça nous résume en tant qu'écrivains.
@Femme libre : Oui, très touchante.
Oui, besoin viscéral de beaucoup d'écrivains: laisser une trace. Chaque livre que j'écris, chaque billet que j'écris répond à ce besoin. Peut-être parce qu'on n'a pas d'enfant?
Saura-t-on un jour pourquoi on vit? pourquoi on meurt?
@ClaudeL : Parce qu'on ne peut pas faire autrement? ;P
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