C'est une femme de 55 ans. Ou plutôt, une femme qui a "ACV + 4" ans. Ça équivaut à 155, je dirais. Sa mère de 88 ans est plus en forme. La vieille mère appelle sa fille de 55 ans tous les jours. Elle va la voir une fois par semaine. L'aide à changer les draps de son lit, vide la litière du chat, lui dit de se laver les cheveux, essaie de tenir ses papiers en ordre.
À son âge, elle ne devrait pas avoir à faire ça. Mais qu'est-ce que les plus jeunes de la famille sont supposés sacrifier pour s'occuper de la femme de 55 ans? Leur couple? Leur travail? Leur santé? Ils ne sont pas prêts à renoncer à leur vie. Pas pour une femme qui ne fait même plus l'effort de se laver le matin. Ils sont ingrats, semble-t-il. Assez pour s'en sentir coupable. Pas assez pour que ça change quoique ce soit à leur quotidien. Ils font ce qu'ils peuvent. Appellent plusieurs fois par semaine. Visitent une fois par mois.
Dès que la femme de 55 ans en a l'occasion, elle se plaint. De sa solitude. De son emploi perdu. De son chum parti. De son souffle trop court et de ses vêtements qui sont laids (parce qu'elle pèse 300 livres, qu'elle boit trop et qu'elle n'a pas mangé un légume depuis sont ACV). De ses enfants ingrats qui ne viennent jamais, dit-elle, la voir.
Et elle se plaint de sa propre mère, la pauvre vieille de 88 ans. La prétend harcelante. Se félicite du fait que quand la vieille appelle, elle lit son journal et ne l'écoute pas. Se moque du sérieux avec lequel la vieille collige et répand les nouvelles familiales. Ne s'intéresse pas au reste de la famille. Geint d'être encore prise avec sa mère dans sa vie. Chiale qu'elle en a pas besoin.
L'ingratitude, ça s'apprend quelque part, maman.
19 commentaires:
J'espère que ça te défoule un peu. Moi, je deviens malin à force d'aller la voir. Je ne suis plus capable. Le pire c'est de la voir être exapérée par ta grand-mère alors que ta grand-mère est 100% plus en forme, énergique, allumée et serviable qu'elle... Grrr!
@Vincent : J'aime pas évoquer les trucs déprimants, mais fallait que je l'écrive. Et tant qu'à l'écrire, autant le mettre ici. Son attitude envers grand-maman, c'est la goutte de trop, oui. Elle vient de noyer la pitié.
J'avoue que je m'attendais à un certain punch, et ton insistance sur l'ingratitude était étrange. Maintenant, je comprends. Ça m'est arrivé d'écrire des trucs comme ça à certaines personnes dans ma famille et ça m'a fait du bien même si je ne leur ai jamais fait lire. Des fois, qu'on soit auteur ou non, l'écriture peu faire baisser la pression.
Mes sympathies.
@Carl : L'écriture est toujours très cathartique pour moi. Mais un moment donné, maquiller les sentiments et les sensations sous le masque de la fiction, ça suffit plus. J'avais besoin de gueuler ce matin j'pense.
Parfois faut que ça sorte. Je compatis. On sent la douleur.
Il y a des mauvaises mères et des mauvais pères comme il y a des mauvais enfants.
J'ai eu des problèmes moi aussi avec ma mère et comme mère moi-même ce qui m'a alors interpellé c'est la question à 10$ : comment mes enfants me perçoivent eux ?
Ça fait mal de penser qu'ils pourraient me juger sévèrement, décortiquer avec une loupe mes travers et même me bannir de leur vie (pas que je crois devoir mériter cela non plus)
Je te souhaite que ta mère se prennent en main et retrouve son équilibre. étonnant quand même ce contraste, toi et ton chum qui semblez si sains au niveau des habitudes de vie...
Post-AVC, nos proches deviennent d'autres personnes, des inconnus.
Quand c'est notre propre mère... Gros et difficile deuil à faire, et de son vivant, en plus.
Je comprends le besoin de défoulement.
@Éléonore : Sans être une mauvaise mère, ma mère, même en santé, n'a jamais été heureuse, bien dans sa peau. Elle s'entraînait et mangeait de la salade comme on prend un médicament. Réclamait beaucoup d'amour, d'aide, d'attention et en donnait peu.
On se bâtit soit par imitation, soit par contraste je crois.
Pour ce qui est de se prendre en main. Ça fait quatre ans qu'on attend.
@Sylvie : Le problème, c'est que je la reconnais trop bien. C'est constamment ma mère des mauvais jours, la loque post-divorce, qui s'agrippait à moi pour que je donne un sens à sa vie... et qui n'était pas plus reconnaissante qu'envers ma grand-mère.
Ça a failli me détruire à l'époque. J'ai pas envie de revivre ça.
... par contraste. Tu as tout à fait raison. Et grâce à plein d'autres modèles. Heureusement.
Et puis, y'a pas de mal à faire ce qu'il faut afin de ne pas revivre ça. Au contraire.
@Sylvie : Mais on finit toujours par se sentir coupable. Et si on le fait pas nous-mêmes, d'autres s'en chargent!!!
Moche comme histoire.
Jusqu'à la dernière ligne, j'avais espoir que ce soit de la fiction.
Après avoir vécu une telle épreuve (ACV), on se demande parfois qu'est-ce que ça prend pour secouer quelqu'un hors de ses habitudes malsaines... habitudes malsaines qui se répercutent apparemment sur sa façon d'entretenir des relations...
Arf... que dire...?
Je te comprend tout plein !! Je vis une situation similaire avec mes deux parents. Des fois, j'ai l'impression que je n'ai rien, mais vraiment rien en commun avec eux.
Un jour je me suis posée la question : Si ces gens n'étaient pas mes parents... seraient-ils dans mon environnement ? La réponse : Non. Alors, j'ai coupé le cordon ombilical. J'ai mis une distance (physique et psychologique) avec eux.
J'ai fait la même chose avec deux de mes soeurs, qui ont la même attitude que mes parents. J'ai réalisé derièrement que je n'avais pas besoin d'eux pour être heureuse... J'ai passé les 50 premières années de ma vie à vouloir me faire aimer, me faire comprendre, me faire accepter telle que j'étais par mes parents. Sans succès !
Depuis que j'ai mis mes priorités sur moi, que j'ai lâché prise, depuis ce temps, je me suis mise à écrire. J'ai trouvé l'inspiration. J'ai trouvé le courage d'écrire.
Je t'envoie tout plein d'ondes positives et ne perds pas ton temps à essayer de changer ou de comprendre ! Y a rien à comprendre ! Elle est comme ça, c'est tout et ne changera que le jour ou elle le décidera ! Ma mère à 70 ans... et elle n'a pas encore décidée !
Courage, ma belle ! xox
Comme Pat, j'espérais que ce soit de la fiction. Parce qu'en fiction, on décide de la finale. Dans la vie, il n'y a pas de finale et ça va rarement comme on voudrait.
Ce genre d'exemple me montre, encore une fois, que je suis choyée et me prouve, encore une fois, qu'on ne se sort pas indemne de notre enfance.
Je pourrais bien te dire qu'en vieillissant, les relations mère-fille ou père-fille sont plus faciles, ce qui fut mon cas, mais ça ne changera rien aux tiennes.
N'empêche, même dans la réalité, tu as le sens du punch, La dernière ligne à elle seule vaudrait un prix.
@Pat : Disons qu'à chaque fois que j'entends "On vit les épreuves qu'on est capable de surmonter", je pense à ma mère et je me dis : "Yeah, right!"
@Lucille : Merci de partager. En effet, avant même son ACV, j'avais commencé à mettre de la distance. Malheureusement, j'ai pas eu le temps de concrétiser complètement la coupure avant que la maladie frappe. Ça aurait été moins dur, du point de vue de la perception des autres à tout le moins.
@ClaudeL : C'est gentil d'apprécier "le punch". Mais j'aurais préféré pouvoir choisir la finale moi aussi! ;) Et j'ai malheureusement pas l'impression qu'avec elle quoique ce soit va changer au fil du temps. Heureusement que mon père est adorable! ;)
Que je te comprends Gen! J'ai mis ma mère en dehors de ma vie il y a maintenant presque deux mois. Les raisons sont multiples, mais je dirais que dans son cas, c'est qu'elle n'a jamais pu comprendre que sa fille était rendue adulte... Contrairement à une idée assez répandue, on ne doit rien à nos parents, ils font le choix d'avoir des enfants et aujourd'hui, pratiquement plus personne n'en a par obligation. C'est une merveilleuse aventure que d'en avoir, mais il faut savoir que rendu à un certain âge, ils ont le droit de faire comme on a fait nous-même, de quitter le nid et de bâtir leur propre vie. En tout cas, pas drôle si elle ne se prend pas en main ta mère, mais tu ne peux absolument rien y faire. C'est à elle de faire ses choix, tout comme à toi de faire les tiens. Et tu as le droit de choisir de vivre ta propre vie et non la sienne par procuration.
@Prospéryne : Le ciel fasse que je me rappelle toujours à quel point essayer d'avoir des enfants a été un choix égoïste! Y'a tellement de parents qui l'oublient!
Ouf! C'est pas pour te décourager, mais j'impression que ta mère n'est pas prête de changer... Et son attitude envers sa propre mère démontre à mes yeux le peu d'importance qu'elle accorde aux autres... Ce qui ne donne pas vraiment envie de se plier en quatre pour elle, hein!
Elle est responsable de son manque d'intérêt envers la vie... ACV ou non. Et comme tu dis, l'ACV n'est qu'un élément du problème, parce que ce n'était pas parfait avant non plus.
Laisse faire les gens qui veulent te faire sentir coupable. C'est facile, de juger les autres, mais s'ils étaient dans tes souliers, ils en feraient probablement moins que toi pour ta mère. Tu fais ce que tu peux, mais tu as ta vie à vivre. Et ta mère a fait ses propres choix...
Triste, mais aucune mère n'a le droit d'exiger de son enfant qu'il assume à sa place ses épreuves. Au contraire, le rôle d'une mère, c'est d'être là pour ses enfants. Hum... Faut croire qu'on a eu toi et moi un petit manque de ce côté là... :S
Allez, on se fera une grosse accolade en vrai lundi... ça fait toujours du bien... :)
@Isa : Vivement lundi, oui.
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