Le sujet a été abordé chez ClaudeL mardi. L'éternelle question québécoise : la langue. LE sujet sur lequel j'arrive pas à me positionner.
Est-ce que je préfère parler français plutôt qu'anglais? Oui, bien sûr... à condition qu'on me permette joual et anglicisme. Parce que le français de France, c'est pas lui ma langue maternelle.
Est-ce que je me verrais écrire dans une autre langue que le français? Jamais de la vie! ... sauf que des fois je dois le faire pour le travail... et que quand j'écris de la fiction, j'aime bien pouvoir utiliser quelques anglicismes... voire, des fois, j'haïrais pas que certaines tournures anglaises existent en français... ou qu'il y ait moyen de traduire punch par quelque chose de plus court que "coup de poing"...
Est-ce que je vais faire apprendre le français à mes futurs enfants? Bien entendu... mais je vais sans doute aussi décréter une "journée anglais" par semaine dans la maison, pour les aider à devenir bilingues plus rapidement que moi (je n'ai acquis ce qualificatif qu'à l'université).
Est-ce que j'utilise des mots anglais comme email, blog, chat, downloader...? Ben oui. Tout le temps. Je suis mariée à un informaticien. Entre le moment où une réalité apparaît et le moment où le mot français est inventé, j'ai déjà pris l'habitude du terme anglais, alors...
Est-ce que ça m'insulte quand on me parle en anglais? Non. Les trois quarts du temps, je réponds dans la même langue, sans même m'apercevoir que la situation pourrait sembler incongrue ou politiquement incorrecte. Même chose pour les sites internet ou les logiciels en anglais seulement : ça ne me demande pas d'effort, alors je ne les remarque pas. Par contre, une version traduite avec des fautes m'agresserait.
Pire encore que cet encouragement passif à l'usage de l'anglais : il m'arrive de proposer à mon interlocuteur de parler anglais quand je constate qu'il rame trop en français. En fait, c'est purement égoïste comme choix : non seulement ça a tendance à accélérer la conversation, mais en plus j'aime mieux entendre de l'anglais bien prononcé que du français tout croche.
Je pense pas que je suis traître à ma patrie ou traître à ma langue pour autant. Des fois je me dis que ce qui différencie un Québécois d'un Canadien anglais, de nos jours, ce n'est plus le fait que le Québécois est francophone, mais bien le fait qu'il est bilingue. Parler deux langues, c'est une richesse inestimable, je m'en rends compte depuis que j'y arrive.
Évidemment, le danger c'est que, dans deux générations, nos descendants ne voient plus l'intérêt de leur première langue... Peut-être qu'on devrait donc commencer tout de suite à leur vanter les vertus du bilinguisme au lieu de se concentrer sur le seul français?
Vous en dites quoi, vous?
11 commentaires:
Apprendre d'autres langues, anglais, espagnol, allemand, je suis d'accord. Anglais surtout au Québec pour des raisons évidentes. Là où je ne suis pas d'accord, c'est de les mêler (comme dans plusieurs sites Internet d'ailleurs). Quand je vais aux États-Unis, je parle anglais et croyez-moi je rame. Mais quand je parle français, je parle... en français. Il ne viendrait pas à l'idée à un anglophone bilingue d'utiliser le mot courriel ou télécharger alors pourquoi en français, on utiliserait e-mail ou downloader? Et parler québécois plutôt que fran^cais de France, je suis entièrement d'accord.
Il faut faire un effort, oui. Ne pas revenir vingt ans en arrière, avant la loi 101, avant que l'office de la langue française ait aidé toutes les entreprises à franciser les termes utilisés dans leur milieu de travail.
J'ai travaillé dans le milieu de l'imprimerie et chaque fois que quelqu'un utilisait le mot screen, je répliquais trame, etc. Et je n'ai jamais accepté d'écrire "gas" au lieu d'essence dans une annonce, même si c'était le client qui payait l'annonce. Sous prétexte qu'on travaille en informatique... pourquoi ce serait l'anglais qui "gagnerait". Y a pas de raisons. Et si vous dites télécharger à votre informaticien, va-t-il comprendre? Oui, alors utilisez-le.
Je ne dis pas qu'il ne faut pas que la langue n'évolue pas, mais quand le mot français existe pourquoi utiliser l'anglais?
Le danger, vous l'avez vu, il est bien là. Au Québec plus qu'ailleurs. Il faut rester vigilant, tout le temps. Et c'est bien l'idée de parler une journée en anglais et cette journée défense de glisser vers le français parce que c'est plus facile. L'inverse est aussi vrai.
Sujet de discussion à l'infini. Ça fait 250 ans qu'il en est question!!!
Il y a parfois une voix en moi qui se demande : pourquoi inventer un mot français quand le mot existe déjà, peu importe en quelle langue? Pourquoi a-t-on inventé courriel mais conservé sushi?
Sur notre planète qui rapetisse tout le temps, ne devrions-nous pas viser l'amalgame? La langue commune qui aurait les nuances et les richesses de toutes les autres?
Difficile de dire si ce serait un idéal ou un cauchemar... Et si Babel s'appelait Internet?
(Oh! Je note ça dans mes trucs de SF à écrire...)
Pour ce qui est des termes anglais en informatiques: on ne s'en sort pas. Et je ne vois pas pourquoi on voudrait s'en sortir. Ce sont les termes d'affaires et ils sont utilisés partout. Je suis convaincu qu'une compréhension mutuelle est plus importante que le poids culturel quand il s'agit d'une langue des affaires.
D'autant plus que les termes français en informatique sont vagues. Je reviens sur l'example télécharger et downloader. Parce que vous en faites mention, et justement, c'est un bel example de l'imprécision du français.
En anglais:
downloader (recevoir des informations)
En français:
télécharger (transférer de l'information)
En anglais:
uploader (envoyer de l'information)
En français:
télécharger (encore!?!)
Voyez-vous? Qu'on reçoive ou qu'on envoit de l'information, en français le mot est télécharger. C'est imprécis et ça mène à de la confusion. On a pas le problème en anglais.
Pour combler cette lacune, on a trouver deux nuances en français:
télécharger en amont et télécharger en aval.
Maintenant, considérez le niveau de culture générale de l'informaticien moyen et je vous garanti que 4 informaticiens sur 5 ne savent pas ce que signifient "en amont" et "en aval". On utilise pas un terme qu'on ne comprend pas.
L'informatique évolue plus rapidement que la langue française. J'ai la nette impression que les gens qui traduisent les termes informatiques anglais en français, sont beaucoup plus soucieux de la beauté des termes que de leur précision et leur utilisabilité.
En affaires, il faut être clair et concis. C'est dommage, mais l'anglais l'est a un meilleur rapport précision-concision que le français. Et, il est plus répandu.
Cela dit... Je ne suis pas un "assimilé" qui souhaite la mort du français. J'aime le français et je m'en sers beaucoup plus que l'anglais. Par contre, selon moi, une langue en vaut une autre. Ce qui vaut plus qu'une langue, c'est 2 langues. Selon moi, la véritable richesse c'est le plurilinguisme.
La structure d'une langue structure la pensée. Certaines pensées s'expriment mieux à travers la structure d'une langue qu'une autre. En apprenant une autre langue, on apprend aussi à penser différemment.
Donc, est-ce que je préfère le français à l'anglais? Oui, mais c'est purement subjectif et intéressé: je suis francophone. Maintenant, est-ce que je préfère le chinois à l'anglais, à l'allemand ou à l'espagnol? Non. Selon moi toutes les langues sont sur un pied d'égalité.
Défendre le français au Québec, c'est valable et pertinent. Parce qu'une langue est une richesse.
Ce qui mérite encore plus d'être défendu, c'est d'apprendre l'anglais ET le français, sur un pied d'égalité. C'est encore plus riche que le français uniquement.
Si la paresse et la facilité nous mène à apprendre que l'anglais et oublier le français, nous n'aurons qu'à nous en prendre à nous-même.
Je pense qu'utiliser les termes d'une autre langue dans le discours familier, c'est très correct. Si un terme est plus précis et correspond mieux à la pensée que l'on essait de faire passer, pourquoi s'en priver?
Bref, allons-y pour l'affichage bilingue. Mais, pour moi, l'unilinguisme c'est du chauvinisme. Notre langue n'est pas meilleure qu'une autre, elle est différente. Il préserver et célébrer les différences, mais il faut savoir évoluer aussi.
Ouais... Un long commentaire. Et assez décousu.
J'espère que mon message va quand même êre bien compris. ;)
Belle image en effet: Babel-Internet.
POur sushi, pizza et quelques centaines dautres, faudrait devenir linguiste. À défaut de tout savoir, je me fie à Marie-Éva De Villers comme ma mère se fiait au encore plus puriste Dagenais.
Encore un gros sujet ! J'ai quatre (quatre !) aspects à discuter...
Linguistique : Il ne faut pas oublier que les langues évoluent par l'emprunt à d'autres langues. De nombreux mots anglais viennent du français, peut-être même plus que l'inverse. La langue doit s'adapter aux nouvelles réalités, mais ça peut prendre du temps. (Je me dois de justifier mes connaissances en disant que ma douce a étudié la linguistique un brin, donc j'en ai appris un peu sur le sujet.)
Les Français : Sinon, ce qui m'insulte le plus, c'est quand un utilise des termes clairement anglophones sans être accusés d'utiliser des anglicismes parce les Français les utilisent. Genre Week-end ! Fin de semaine, c'est un anglicisme, mais week-end c'est ok ! J'ai envie de placer ici un beau juron bien québécois...
Les étudiants étrangers : En recherche universitaire, on reçoit souvent des étudiants venus de l'étranger. Ces gens ne parlent souvent pas français et ne l'apprennent que rarement. Le problème c'est quand on a des réunions avec eux. Si on est dix à se rencontrer et qu'il y a un seul anglophone, on doit faire la réunion en anglais. Je suis partagé entre l'indignation et le désir d'efficacité.
Écriture : Avec Antidote, on peut évaluer le contenu d'un texte en anglicisme, langue soutenue, etc. J'ai comparé le texte de deux de mes romans : un roman d'horreur contemporain et un roman fantasy/science-fiction et le niveau de langue des deux romans est très différents. Le roman f/sf est écrit dans un français internationnal alors que le roman d'horreur jongle entre le littéraire et le québécois. J'aurais mal vu un roman f/sf situé dans un monde imaginaire écrit avec plein de québécismes (ou de francismes tant qu'à y être(mon dieu ! francisme est considéré comme un québécisme !)). Par contre, pour un roman d'horreur qui se passe au Québec, je ne vois aucun problème avec ça.
Et puis, comme c'est en lien avec le sujet, j'ai appris ce matin que Morlante de Stéphane Dompière sera exporté en France. Vont-ils le sous-titrer ? J'aimerais bien voir Edouard Bond exporté en France...
Tout à fait d'accord avec Fred à propos des Français utilisant des termes anglais impunément. C'est inexcusable.
Calquer le français du Québec sur celui de la France, c'est échanger quatre "trente-sous" pour une "piasse": à une époque, ça n'aurait rien changé, mais maintenant, je suis sûr qu'on perdrait au change. ;-)
J'ai effectivement l'impression qu'avec la notion d'évolution de la langue, tu touches à quelque chose Frédéric... Est-ce qu'en voulant trop préserver le français, on ne court pas le risque de le figer?
Pour ce qui est des emprunts à l'anglais... Bon, les Français, ils sont en France et qu'ils y restent (avec leurs week-end, shopping et autres). Exception faite de quelques amis, qui viennent de "province" de toute façon :p
Pour le phénomène des réunions à dix qui se passent en anglais pour le seul anglo du groupe... Ben si l'anglophone en question a l'intention de passer seulement un an ou deux au Québec, je peux comprendre qu'il apprenne pas le français. Quand il est né à Westmount et vit à Greenfield Park, là j'ai plus de mal... Mais, dans tous les cas, j'aurai toujours tendance à me payer gentiment sa tête en français si l'occasion se présente ;p
Pour l'écriture, oui, le niveau de langue est, je crois, fonction du concept. Et lol! Bond en France! Quoique... quand ils veulent... ils comprennent Fred Pellerin ces temps-ci! :)
Je suis d'accord avec toi Vince : je crois que si on échangeait notre français avec celui de la France actuelle, on perdrait beaucoup.
Fouille aille aille.
J'ai l'impression d'etre le seul parigot de la liste, et j'en entend des pas mures dans le coin !
[Excusez l'absence d'accents c'est que ce foutu clavier n'en a pas, je n'en trouve pas de ce cote-ci de ce pays bilingue!]
Les quebecquois sont, il me semble, bien plus perturbes avec leur langue que les franchouilles. Etant egalement informaticien (decidemment), je peux vous dire que le Quebec a des lois sur la protection de la langue que la France n'a pas. Quand on traduit un logiciel en Quebecquois, il faut prendre des pincettes au risque de se faire coller un proces aux arpions.
Le fait de dire 'Week-end', 'faire du shopping' n'enleve rien a notre langue. Les rosbiffs, eux, ils disent bien "cul-de-sac' et 'deja-vu', est-ce qu'il se prennent la tete pour autant? pas vraiment. Va-t-on se mettre a compter les points? Pfff... autre chose a faire.
Je concois qu'on se sente encercle au Quebec, mais vous avez mis tellement de barrieres legales que meme un Quebecquois de souche ne pourrais se laisser aller sans se faire taper sur les doigts. Je me rapelle par exemple de l'histoire intrigante, il y a quelques annees, d'un commercant anglo de Montreal qui avait accroche un signe en Anglais, et pas en Francais, a son magasin...
Ces barrieres artificielles ne font rien, je trouve, pour preserver la langue, si ce n'est envenimer un debat qui n'a pas besoin de l'etre. Le peuple doit parler sa langue et la faire evoluer, cassons les barrieres, une langue vivante doit l'etre. Sinon, on n'a qu'a se mettre au latin, et la on sera peinards. Notez que si on recommencait a le parler, le Latin, sur qu'il evoluerait lui aussi (week-endus, week-endae, week-endum,...) !
Finalement, la langue universelle, desole, mais c'est l'anglais, ca n'empeche pas, et n'empechera jamais, les gens de parler leur "patois" local, Francais, espinguoin, ou wolof.
Et croyez moi, le parigot est tout aussi colore que le quebecquois, surtout qu'on y integre aussi de l'arabe aussi de nos jours. ("shouffe le carosse", "zarma le keum" et autres schmurtzes). Pour le mieux... Et bin pourquoi pas?
Je vais en choquer beaucoup, mais je dis quand même le fond de ma pensée, qui provient du plus profond de mes entrailles de québécoise pure laine : bonyenne, on aurait dû s'assimiler aux anglophones depuis des lustres! Parler anglais, se mêler et arrêter de se mettre nous-mêmes des bâtons dans les roues avec notre protectionnisme à la noix!
Ouf! C'est dit, je me sens mieux. Ma frustration vient du fait que je ne suis absolument pas bilingue. Mes parents connaissaient chacun cinq mots en anglais (cat, dog, toaster, yes et no). Au secondaire, ça allait, je me débrouillais, mais aujourd'hui je suis rouillée sans bons sens.
Ne vous y trompez pas : J'adore le français, j'écris en français et la richesse de notre belle langue m'émerveille. Et je ne me verrais pas écrire dans une autre langue. Forcément : c'est la seule qui m'est coutumière...
L'effort à produire aujourd'hui pour apprendre l'anglais me semble insurmontable. Et, comme personne ne le parle dans mon entourage, à quoi bon? Alors j'en suis réduite à baragouiner quand je tombe sur un anglophone pur et dur. Moche.
Moi je dis : préservons notre belle culture, notre joual et nos mots d'église, mais évoluons aussi, de grâce! L'anglais est LA langue universelle. Dans l'informatique comme ailleurs. C'est ça qui est ça, acceptons-le et passons à autre chose!
Ce que je retiens de vos commentaires, Alex et Isa, c'est que vous êtes d'accord avec moi : le français, c'est bien beau, mais faudrait l'anglais aussi.
Alors je vais continuer de prôner le bilinguisme sans me sentir coupable de transgresser la loi 101... et souhaiter à Alex de trouver un jour un clavier bilingue à Vancouver ;p
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