Petite baisse de motivation entre deux paragraphes d'Hanaken. Je tourne donc la tête vers la fenêtre de mon salon et je m'offre une petite pause "observation du voisinage". D'ordinaire, c'est vite terminé. À cette heure-ci, je suis à peu près le seul habitant de ma banlieue. Les autres sont partis travailler. Pas de piéton dans la rue, pas de voiture. Une marmotte traverse d'ailleurs la chaussée sans se presser. Y'a un lièvre qui broute dans la plate-bande d'un voisin. Des oiseaux picorent les fruits de mon pommetier . Bref, les origines du terme "banlieue dortoir" s'étalent sous mes yeux.
Puis je remarque qu'à quelques maisons de chez moi, une femme est occupée à désherber l'incroyable exposition florale qui agrémente sa façade. Je la reconnais : avant que j'arrête de travailler, je la croisais souvent dans le bus. Une comptable, toujours habillée de vêtements de créateurs québécois ou canadiens, qui prenait l'autobus par convictions écologiques (et parce que ça lui donnait le temps de lire ses romans policiers). Dernièrement, elle m'avait dit qu'elle allait bientôt prendre sa retraite.
Faut croire que c'est fait.
Après son désherbage patient, je la vois ramasser les feuilles arrachées et aller les porter dans une boîte de bois sur le côté de sa maison. Ah, un composteur. Ensuite, elle remplit un arrosoir à même une citerne verte branchée sur la gouttière de sa maison. Un récupérateur d'eau de pluie. Je suis impressionnée. Et je ressens un léger complexe. Je considère que mon mode de vie est assez écolo, mais je n'ai ni composteur, ni récupérateur d'eau de pluie. Bon, j'ai pas de jardin non plus, alors je sais ben pas ce que je ferais avec de l'engrais et de l'eau...
La dame revient vers sa plate-bande et abreuve certaines espèces de fleurs. Puis elle utilise une manette pour ouvrir la porte de son garage et va y ranger ses outils de jardinage. Je m'attends à ce que la porte du garage se referme derrière elle. C'est pas plus mal : j'ai un chapitre à terminer moi, faudrait que j'arrête d'espionner les gestes insignifiants d'une jardinière de banlieue, fusse-t-elle écolo...
Contre toute attente, la dame ressort de son garage. Elle contemple son allée. Suivant son regard, j'y vois reluire des petites roches. Y'a des brins de gazon coupé et un peu de terre aussi. La dame redisparaît dans son garage. Lorsqu'elle ressort, elle a un boyau d'arrosage à la main.
Non?!? Elle ne va pas vraiment?
Et oui. Dans un geste de banlieusard caricatural (parce qu'on le rencontre quand même de moins en moins), la dame dirige un jet d'eau vers son allée et chasse minutieusement le gravier et les autres petits déchets jusque dans la rue.
Mes complexes s'envolent aussitôt. Gaspiller de l'eau pour arroser de l'asphalte, j'pense pas qu'il y ait pire niaiserie! Mais d'où vient ce désir qu'ont certaines personnes d'avoir une allée dépourvue de toute saleté?!? Et pourquoi le balais n'est-il pas l'instrument utilisé pour le réaliser?
J'ai beau avoir vécu toute ma vie dans la banlieue, cela demeure un mystère.
9 commentaires:
On dirait que cette femme est écolo juste pour être IN.
Tu savais pas que c'est ben trop forçant de balayer son entrée (j'ai passé presque 5h en 2 jours à faire ma cour au balai :P)
@Gaby : Comme je ne balaie jamais la mienne (elle est sale et je m'en fous), non j'ai pas remarqué! :p
Petits gestes automatiques qu'on exécute sans réfléchir? Je n'ai jamais balayé ou arrosé mon entrée, mais j'ai un compost mal nourri, parce que je suis trop paresseuse pour l'entretenir. Un jour, ça sera géré par la ville! Pus de problème.
Haha je trouve la finale absolument délicieuse! ;)
@Hélène : Peut-être la force de l'habitude, en effet...
Pour le compost... Je trouve que c'est du trouble en maudit que d'entretenir ce processus qui devrait être naturel!
@myr_heille : Je savais que je vous ferais rire. J'en revenais pas moi-même!
Les retraitées de ma rue aiment pas mal leur boyau et leur asphalte. Nos générations se rejoignent pas pantoute sur ce point! Et eux, ils doivent me trouver fou avec mon armée de pissenlits.
Ma voisine en arrière pousse tout jusqu'à chez nous (même les débris de la ruelle)
soupir...
mon père lui a dit: voyons donc! ça pousse pas l'asphalte! Je pense qu'elle a rien compris.
@Dominic : Dans mon coin, je dois dire que les pissenlits sont démocratiques : ils attaquent tous les terrains (la ville a décidé qu'elle les endurerait... et il y a un parc sur ma rue : c'est jaune à la grandeur!). Les rares qui s'acharnent à les enlever finissent par avoir plus de trous que de gazon! :p
Mais ouais, fossé générationnel autour du boyau d'arrosage! :p
@idmuse : Bah, heureusement, comme l'asphalte ne pousse pas chez toi non plus, les débris ne devraient pas trop nuire! :p
@Dominic : Dans mon coin, je dois dire que les pissenlits sont démocratiques : ils attaquent tous les terrains (la ville a décidé qu'elle les endurerait... et il y a un parc sur ma rue : c'est jaune à la grandeur!). Les rares qui s'acharnent à les enlever finissent par avoir plus de trous que de gazon! :p
Mais ouais, fossé générationnel autour du boyau d'arrosage! :p
@idmuse : Bah, heureusement, comme l'asphalte ne pousse pas chez toi non plus, les débris ne devraient pas trop nuire! :p
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