Je suis derrière ma table de vente, à Gatineau, armée de mon meilleur sourire. C'est dimanche, il est 15h30, j'ai les pieds et le dos en compote parce que je piétine sur place depuis deux jours. Arrive un papa dans la quarantaine accompagné de son adolescente. Celle-ci a repéré Hanaken (ainsi que ma super tunique chinoise assortie aux couleurs de la couverture) et s'approche.
Je leur fais donc mon petit laïus. L'ado s'empare du livre et le feuillette, des étoiles dans les yeux. Ça sent la vente! :)
C'est alors que le papa me demande, comme plusieurs, d'où m'est venue mon inspiration pour écrire mon roman. Je lui parle de mon bacc en histoire, de mes cours de japonais, de mon amour des arts martiaux. Il m'interrompt pour me balancer une autre question, que je n'entends pas non plus pour la première fois :
- Êtes-vous déjà allée au Japon?
Comme d'habitude, je réponds honnêtement que non, que j'espère y aller un jour, mais que c'est un coin de la planète fort dispendieux.
- Ah, me coupe-t-il alors d'un ton dédaigneux, alors vous avez juste une connaissance livresque du pays?
C'est pas la première personne qui me fait le coup depuis le début de la journée. En plus, il a déjà pris le livre des mains de sa fille et l'a posé sur le présentoir. Ils s'en vont. Je ne ferai pas cette vente-là, le salon achève, je suis écoeurée... Bref, je ne me retiens pas :
- Ben oui, mais si vous trouvez quelqu'un dans ce salon qui a une connaissance directe du Japon du seizième siècle, vous viendrez me le dire!
Il s'est éloigné l'air offusqué, mais sans avoir l'air de comprendre ce que j'avais voulu dire. Pfffff!
Enfin, maintenant je prendrai plus de chance. Ma réponse à "Êtes-vous allée au Japon?" sera désormais "Non, mais l'époque sur laquelle j'écris est terminée depuis 500 ans là-bas aussi"!!! :p
16 commentaires:
Non, mais pour qui il se prend lui! Un expert sur le Japon médiéval? Excellente réponse à envoyer Gen!
Il cherchait un prétexte pour ne pas dépenser je suppose. :P
Sans blague, il y a vraiment des gens qui n'ont aucune classe! D'après moi, il aurait aussi voulu que tu aies les yeux bridés, question que ça fasse plus vrai...
Lâche pas, Gen! Pour un inconscient comme celui-là, il y en aura plein d'autres qui sauront apprécier Hanaken... :)
Dommage pareil pour sa pauvre petite puce, elle vient de perdre un fichu bon roman...
Il a pas rapport, le papa, mais quand même, je jurerais qu'un voyage au Japon est dans votre liste de projets à réaliser! En tout cas, c'est sur la mienne. Quel pays fascinant!
Pour le Chasseur, si on te reproche de ne pas être aveugle, vlan, tu te plantes une fourchette dans l'oeil :-)
À ce compte, comment écrire un roman qui se passe dans les années 1900, 1850, 1800, 1700, etc. Peu importe où?
J'ai visité l'Irlande en 1970 et même pas la région de mes ancêtres, ça fait bien dans une conversation, mais ce furent bien plus les recherches sur les années 1847 qui m'ont permis de documenter mon roman.
Tu pourrais dire: non, je n'ai pas visité le Japon du 16e siècle.
@Prospéryne : Comme beaucoup de gens, il pense que si tu as appris quelque chose dans un livre, ça vaut pas un bon vieil apprentissage sur le tas. Mais y'a des matières où l'expérience réelle est un ti peu difficile à réaliser! :p
@Vincent : Ouais, peut-être, mais il avait l'air vraiment outré que je me permette d'écrire sur le Japon sans y être allée.
@Isa : J'aurais pu écrire en japonais aussi, tant qu'à faire! lol! La puce avait effectivement l'air déçue. J'espère qu'elle convaincra maman d'acheter le bouquin plus tard!
@Femme libre : Oui, c'est sur ma liste. Le Japon et l'Italie (ou alors seulement Rome). Dans les deux cas, si je deviens une auteure assez populaire, je peux espérer avoir un jour la chance d'y obtenir une résidence d'écrivain.
@Richard : Ou dans l'oeil de mon vis-à-vis? :p
@ClaudeL : Bons points... mais c'est drôle : je suis sûre que pour les coins moins "exotiques", les gens ne posent pas de question. Si tu vis à Québec et que ton roman se passe à Montréal, personne ne te reprocheras d'en avoir juste une connaissance livresque! lolol!
De mon côté, puisque c'est écrit que j'ai déjà goûté à la chair humaine en quatrième de Prison de poupées, on ne me pose pas trop de questions pour valider si je « connais bien mon sujet ». En fait, je crois qu'on ne veut pas le savoir.
@Ed : Pwahahahahaha! :) Ouais, de fait, j'pense que dans ton cas, on aime mieux pas savoir ce qui est de la fiction et ce qui n'en est pas! ;p
C'est drôle, y'a d'ailleurs personne qui m'a demandé si j'avais déjà décapité quelqu'un...
Hummm... la prochaine fois, dis-oui. Juste comme ça, pour voir.
@Didie : Ben... J'ai pas envie de mentir juste pour vendre un bouquin. :S
Nah... c'est juste pour voir la réaction... *regard de côté*
Donc, on ne peut écrire que sur des endroits qu'on a visités et sur des sujets vécus ?! Ça limite un peu le nombre d'histoire, m'essemble. "Exit" la science-fiction & la fantasy et vive l'auto-fiction !!! Me demande ce que monsieur pense de Harry Potter. ;-p
En attendant, je vais m'ouvrir les veines, parce que moi, l'auto-fiction...
C'est donc ben plate pour toi :(
En plus tu pourrais vivre au Japon et en savoir moins que bien d'autres.
Regardes il ya bien des Canadiens qui ne savent rien du Québec.
Entéka une chance que tu écris pas sur Mars !
@Didie : Je suppose que là il me poserait plein de questions sur ma pseudo expérience et qu'au premier truc que je saurais pas, la réaction serait la même.
@Caro : J'ai eu la nette impression que ce monsieur ne devait pas fréquenter la SFFF :p
@Éléonore : Bon point à propos de "vivre en un lieu sans le connaître"! ;)
Enregistrer un commentaire