lundi 10 janvier 2011

Mes images

J'suis pas une écrivaine : j'suis une peintre frustrée. Pour moi, toute histoire commence avec une image que j'essaie ensuite de traduire en mots.

Sauf que quand j'écris que "l'inspectrice avait l'air d'un croisement entre une poupée de geisha et un motard punk", je ne peux pas savoir ce que ça va vous évoquer. Si j'avais deux onces de talent pour le dessin, je pourrais pourtant vous dessiner mon personnage jusque dans ses moindres détails. Vous le reconnaîtriez en le croisant dans le métro...

Mais, voilà, je vaux rien en dessin ou en peinture ou en sculpture. Mes images, elles restent prisonnières de ma tête, je n'ai que mes mots pour tenter de les partager.

Quand j'écris, je mime, je grimace, je me déplace, je donne des coups dans le vide, je visualise des dispositions d'objets, des gestes... Puis j'essaie de décrire ce à quoi je viens de donner corps. Au début, j'essayais de décrire minutieusement chaque détail. Ça donnait des paragraphes indigestes où on se perdait. À présent, je me résigne à faire des descriptions plus floues. J'axe sur les éléments importants pour le récit et je laisse le lecteur se faire sa propre image. J'essaie d'accepter, même si c'est dur, qu'elle sera différente de celle que j'avais en tête au départ...

Mais là, je viens d'avoir l'occasion, pour mon roman jeunesse, d'envoyer à l'illustratrice des photos de moi en train d'accomplir certains gestes de mes personnages.

Sensation grisante! Trip rare et savoureux!

Je sais que ces illustrations-là vont refléter exactement les gestes que j'avais en tête... que le salut du guerrier, ce sera mon salut du guerrier... et je n'en peux déjà plus d'attendre de voir les esquisses! J'ai tellement hâte de voir mes images... en image! :)

Et vous, comment se porte votre rapport à vos images intérieures? Et même... est-ce que vous bâtissez vos histoires à partir d'image? Ou de sons? Ou d'odeur? Ou de paroles? Ou... que sais-je?

21 commentaires:

ClaudeL a dit…

Ça me fait penser à la question qu'on me posait à 15 ans et qui me hante encore: rêves-tu en mots ou en images? Je me pouvais pas imaginer que quelqu'un puisse rêver en images puisque, éveillée ou endormie, je fais des phrases, je parle, je fais parler. Des mots tout le temps.
Mais je m'améliore avec les années, mes yeux voient et tout de suite les mots se lèvent. Je me dis que j'ai d'abord vu des images.
Alors pour mes romans, oui, je dois bien admettre qu'il y a d'abord une part d'images, mais je dois me battre contre mon petit ange verbomoteur pour qu'il accepte de dépeindre les personnages et les lieux. Fait pas longtemps que j'ajoute odeurs et sons. Et ma muse, elle, pourtant artiste peintre, ne sait inventer que du dialogues: elle a dit, il dirait...

Quant à la hâte de voir mon roman en images, c'est déjà fait: la couverture est presque terminée. Nous avons eu la fierté de la réaliser-monter plutôt que la surprise de la voir apparaître d'un coup de baguette magique.

Gen a dit…

@ClaudeL : Intéressante question... moi je rêve peu, mais je rêve en image et en sensation.

Mes histoires, je les vois souvent comme des scènes de cinéma... mais pas toujours. Certaines sont constituées de voix désincarnés, d'impressions...

Mais jamais vraiment de phrases et de mots. Mes mots, je les sors un par un, avec effort.

Ah oui, c'est vrai, tu as fait ta couverture toi-même... Moi je dois dire que j'attends impatiemment la "baguette magique" ;)

Éléonore a dit…

très intéressant ce que tu as fait, je te souhaite que l'illustratrice capte vraiment ce que tu désires.

Moi aussi je suis très visuelle.
Quand j'écrivais plus, il y avait vraiment un film dans ma tête.
Maintenant, à l'inverse ce sont mes photos (ou celles des autres) qui me racontent des histoires.

Un peu en parallèle de ta question, une chose qui me dérange beaucoup quand un roman est porté à l'écran c'est que l'acteur ne corresponde pas à la description fournit par l'auteur. Si l'auteur prend la peine de nous dire que son personnage est grand mince noir et athlétique ben il faut respecter cela.

Gen a dit…

@Éléonore : Oh! Tellement d'accord en ce qui a trait aux acteurs!!! Justement parce qu'il y a un film dans ma tête quand je lis ou quand j'écris, me semble que c'est très important le physique des personnages au final.

Isabelle Lauzon a dit…

Pour ma part, quand je rêve, je vois des scènes de films (parfois même des films complets!). Peu de dialogues, mais beaucoup d'action. Un peu comme pour toi, Gen, ce n'est pas toujours facile à décrire en mots, ça...

Pour ce qui est des idées dans la voiture, je ne vois pas vraiment d'images (heureusement, hein, sinon j'aurais un accident!). J'écoute la musique et des bouts de dialogues me viennent, ou des histoires, mais là, ce sont vraiment des mots, des mises en situation. Le visuel n'est pas vraiment impliqué dans ces cas-là (je te l'ai dit, je conduis, faut que je me concentre quand même!) ;)

En tout cas, je trouve ça super (et un peu cocasse!) que tu aies pu envoyer des photos à ton illustratrice. Ça va donner un résultat du tonnerre! :D

Gen a dit…

@Isa : Cocasse en effet. ;) Mais ce sera pas moi qui sera représentée sur les photos : Sybiline s'en servira seulement pour placer ses propres modèles.

Guillaume Voisine a dit…

Mmmm. Je suis en désaccord par rapport aux adaptations cinématographiques, justement parce que ce sont des *adaptations*, pas des copies intégrales.

Ça signifie que ce sont des oeuvres à part entière, et que, par exemple, le réalisateur DOIT avoir une part de liberté créatrice pour que le film ne soit pas une bassesse hollywoodienne pré-digérée. Si ça passe par le casting qui clash avec les descriptions de l'auteur, ainsi soit-il, tant que c'est pertinent dans la démarche du réalisateur.

Gen a dit…

@Guillaume : Je retiens un bout de phrase : "pertinent dans la démarche du réalisateur". On s'entend que beaucoup d'adaptation ne sont pas soutenue par grand "démarche". Et que certaines "libertés créatrices" ont plutôt pour but de transformer une grande oeuvre en bassesse pré-digérée, non?

Mais bon, ok, je suis d'accord sur le principe. C'est vrai que des fois on peut prendre "le grand roux" et en faire un afro-américain (Shawshank Redemption).

Carl a dit…

Pour revenir à ton billet, je t'avoue que je travaille moi aussi beaucoup par images. Le problème, c'est que j'en viens à perdre de vue la narration et je me retrouve avec un scénario. De là, je retravaille le texte en me demandant ce que ressent le personnage, l'ambiance, les bruits, etc. et je me retrouve avec une bonne base. Ce qui est intéressant de l'illustration, c'est justement de pouvoir diriger la lecture dans le sens où l'on souhaite qu'elle aille.

J'ai bien hâte de voir ça !

Anonyme a dit…

Isabelle S au boulot dit:

C'est là que mes passion connexe me viennent en aide. J'aime dessiner, colorier et peindre. J'ai souvent des images, des flash qui me permettent de faire des descritpions qui servent le récit. Des fois, je prend tellement de temps à faire des descriptions, que je m'efforce d'être concise et d'éviter le superflu, que j'oublie de mettre des détails que le narrateur doit mentionner. Une chance que j'ai des amis qui me relisent...
Ça me sert aussi au travail... je parle en image et ça aide à faire comprendre des choses abstraites en les transformant en concret.

Gen a dit…

@Carl : En effet, le danger d'avoir les images en tête, c'est d'écrire sur le mode script...

D'un autre côté, des fois je me demande si j'ai pas manqué ma vocation! lol! C'est ptêt des scénarios que j'aurais dû apprendre à écrire!!!

Gen a dit…

@Isabelle S : J'ai touché au dessin, à la peinture, à la sculpture, à la couture, à la photo... nulle, nulle, nulle!

C'est pas pour rien que je me maquille pas : j'ai pas de talent!

Mais oui, heureusement qu'on a des lecteurs pour nous dire quand on en met trop ou pas assez!

Lucille Bisson a dit…

Si ça peut t'encourager, Gen, tu n'es pas seule qui n'a pas été favorisée par la Fée dessinatrice. Je suis d'autant plus nulle en dessin, que même mes bonhommes alllumettes en arrache.

Les scènes se déroulent comme un film que je vois dans ma tête et qui va et vient au rythme des mots que j'écris. Comme un "rewind" automatique. Et pour pouvoir vivre mon film souvent, depuis le début de l'année, je marche pour aller travailler. 30 minutes matin et soir que je passent avec mes personnages... et ainsi j'évite des accidents de voiture.

Étant ma première expérience en écriture de roman, j'ose croire que je serais capable de mettre en mots les images qui trottent dans ma tête. On verra...

Lucille Bisson a dit…

oups... que je passe

Sylvie a dit…

C'est l'fun de te voir aux prises avec des sensations grisantes. Et quand devrais-tu avoir le bonheur de recevoir ces esquisses ? Devras-tu exercer ta patience très longtemps ?

Pat a dit…

Hum!
Billet fort intéressant, Gen. Ça m'amène à réfléchir sur ce fameux rapport à l'image.

J'avoue que le tien est intéressant. Y donner corps dans le réel puis essayer de le rendre sur papier. Je t'imagine aisément tester quelques coups, quelques élans avant de t'atteler au clavier.

Bonne chance avec les illustrations. Mais n'oublie pas non plus que c'est avec une artiste que tu travailles. Elle est comme toi. Laisse-lui aussi un peu de liberté créatrice ;)

Gen a dit…

@Lucille : Ouais, moi aussi même les bonhommes allumettes sont pas fameux! lolol! Le pire, c'est que j'adore gribouiller. Pour le film... bonne chance! Mais t'étonne pas si tu as pas l'impression de trouver les mots : je pense que c'est normal.

@Sylvie : Mets en que c'est le fun! ;) Le temps des Fêtes étant ma période sombre de l'année, ça change le ton, hein? ;p Pour les esquisses, j'en ai pour un mois ou deux au moins.

@Pat : Toi t'as la chance d'arriver à dessiner honorablement au moins!

Je ne teste pas que les coups : je teste aussi les déplacements, les gestes, je me fais des grimaces dans le miroir...

Et oui, je sais que Sybiline va avoir sa part de créativité, mais elle m'a demandé des photos pour un geste qui est très particulier (et très japonais) que j'avais du mal à expliquer. Là, avec la photo, elle va pouvoir le reproduire correctement (sous les traits du personnage, qui, eux, sont complètement livré à son bon plaisir).

J'ai hâte de voir le résultat! :)

Pat a dit…

Dessiner honorablement?

Merci merci :)

Mais, souvent, je préfère harceler Copine pour qu'elle dessine mes personnages plutôt que de le faire moi-même.

Ça te rappelle quelqu'un? ;)

Pour ce qui est des traits de tes personnages, je te rappelle qu'il y a peu, tu avais laissé quelque chose comme «mes personnages n'ont pas de visage» sur ton blog, promettant d'y revenir et d'approfondir l'idée...

Je dis ça comme ça... :)

Joe G a dit…

Alan Moore est connu pour faire recommancer des pages complète aux dessinateurs, plusieurs fois d'affiler, pour que sa soit comme LUI l'imagine.

Gen a dit…

@Pat : Ah oui, j'ai dit ça? Pourtant... Je vais chercher, retrouver ce que je voulais dire et j'y reviens! Et oui, ta méthode me rappelle quelque chose ;)

@Joe : Y'a des dessinateurs qui doivent l'haïr! J'espère qu'il explique bien!

Gen a dit…

@Pat : Après recherches, faut vraiment que tu me retrouves où je disais ça!