Arrive un moment dans notre vie où on calcule avec réalisme nos chances d'arriver à vivre confortablement de notre plume et où le résultat (0,1%, soyons généreux) nous écrase. D'ordinaire, ça donne soit ce que Dominic et Mathieu ont écrit hier, soit on arrête d'écrire comme je l'avais fait, jadis (quitte à s'y remettre quand on constate la détérioration de notre équilibre mental).
Si on continue (ou recommence) à écrire, deux voies s'offrent à nous :
1- Se dire que nous, on va réussir. Quitte à sacrifier beaucoup. Quitte à sortir des textes dont on est moins fier, juste pour recevoir le chèque au plus vite. Quitte à s'arracher les cheveux les soirs où les ventes au salon du livre ont été mauvaises. Quitte à briller devant la boîte aux lettres en y déposant nos demandes de bourse. Quitte à vivre amer, envieux, stressé et toujours déçu, les yeux fixés sur un horizon inatteignable.
2- Accepter que le marché est contre nous. Se trouver un boulot qui paye décemment. Et continuer à écrire dans nos loisirs. En publiant de temps en temps et en éclatant de fierté à chaque fois. En dépensant en luxes avec les chèques de droit d'auteurs, parce que c'était pas de l'argent prévu. En faisant les demandes de bourse le sourire aux lèvres, comme si on achetait un billet de loterie. Être heureux de ce qu'on a, sans renier notre rêve d'écrire à temps plein, mais en étant toujours conscients que ce n'est que ça : un rêve. Et qui sait, il se réalisera peut-être, si les astres sont bien alignés. Sauf qu'on n'aura pas gaspillé notre vie à l'attendre.
Après mon retour à l'écriture, j'ai évidemment choisi la voie 2. Est-ce que c'est de la résignation indigne d'un vrai artiste? Peut-être. J'ai toujours dit que j'avais pas le profil "créateur torturé". Plutôt martial artist zen.
Vous en dites quoi? Vaut-il mieux poursuivre le succès avec archarnement ou lui ouvrir la porte et espérer qu'il s'amène de lui-même?
28 commentaires:
Disons que tu as une façon assez partisane de présenter les 2 options. :p
Nooooon ;)
Je me console en me disant : si je n'avais pas essayé, je l'aurais regretté longtemps. Je préfère nettement tenter ma chance, miser gros et me planter que de choisir l'inertie.
C'est en essayant des trucs qu'on acquiert de l'expérience. Avec mes récentes mésaventures, j'ai découvert ce que j'attendais vraiment de l'écriture.
Je préfère également la 2.
Ma vie est plus importante que mon art. Mon écriture me donne plus de plaisir lorsque ce n'est qu'un loisir.
Je réponds : Zen ET résignée. Il faut mener notre vie de manière à être satisfait, pas frustré à cause de nos beaux principes. Et pas juste au plan professionnel, d'ailleurs.
@Dominic : En effet, t'as rien à regretter! :) La prise de conscience est nécessaire je pense. On peut la faire en arrêtant d'écrire ou en essayant d'en vivre. Dans les deux cas, ça permet de voir quelle place l'écriture occupe dans nos vies.
@Mercure : Bienvenue ici! :) J'suis pas prête à dire que ma vie est plus importante que mon art, mais j'aime mieux vivre pour écrire qu'écrire pour vivre. ;) Alors que le travail, c'est le contraire! ;)
@Sylvie : Le zen peut-il exister sans une certaine part de résignation? En effet, il faut mener nos vies de manière à éviter les frustrations. Elles ne donnent rien de bon.
Zen = une certaine part de résignation.
On se comprend. ;)
@Sylvie : Mon papa-tendance-gourou te dirait que le zen étant le détachement, c'est sûr qu'il est résigné :)
Moi aussi, je laisse les choses venir. Ça me viens également de mon côté martial zen. Dans les salons, j'ai parfois l'air de vouloir vendre, mais je ne fais que parler de nos livres avec passion, tout simplement parce que la littérature me passionne. Je ne sais jamais combien de livres j'ai vendus, mais je suis toujours content des rencontres et des discussions que j'ai eues dans les salons. L'argent viendra, je le sais. En attendant, j'enseigne avec passion parce que le littérature me passionne (ouais, j'ai déjà dit ça... ;-)
@Carl : Et tu nous donnes envie d'acheter! :) J'essaie de faire comme toi : me dire que l'argent viendra en temps et lieux. Et sinon, ben tant pis : je m'arrange pour ne pas en avoir besoin pour vivre!
Je vais répondre dans un billet sur mon blogue (ça m'inspire, je sais pas). Je ne sais pas dans combien de temps exactement. Mon point de vue diffère de celui que tu exposes. En tout cas ;)
@Guillaume : Pas de trouble, j'expose surtout la voie que j'ai choisie pour, moi, bien vivre tout ça ;)
Et oui, c'est un sujet inspirant on dirait!
D'accord avec toi, Gen.
Juste un truc cependant: il me semble à moi très difficle d'écrcire du pop: c'est à dire produire quelque chose qui plaise à un grand nombre de personnes au point qu'elles le recommandent, etc...
Il me semble à moi beaucoup plus facile d'écrire ce qu'on veut, que d'écrire avec ces contraintes commerciales. J'ajouterai donc la voie numéro 3:
- Ecrire comme un hobby, avec un "vrai" job qui paye les factures, jusqu'à ce qu'on trouve la formule "magique" qui vendent des milliers, ou millions, d'exemplaires (et ce en acceptant de se planter en route).
@Alex : Je pense que justement en ayant un job qui paie, on peut se permettre de se foutre des contraintes commerciales, écrire ce qu'on veut et espérer que ça pogne.
Entk, c'est comme ça que je fonctionne ;)
J'y vais aussi avec l'option #2 avec une nuance personnelle. La job qui paie, qui nous fait vivre et bien moi, il faut que je l'aime. De là, mon retour aux études en littérature. Je travaillais dans les prêts hypothécaires et je détestais ça. Au point de me rendre au burnout. Je vais entamer ma 3e année en littérature et oui, je veux écrire, oui, j'aimerais en vivre mais je sais pertinemment que c'est illusoire. Je vais peut-être plutôt essayer de devenir rédacteur-réviseur pigiste. Histoire d'avoir des horaires qui me conviennent.
Bref, chacun notre voie. Et dans le fond de notre coeur, on espère tous que ce rêve quasi impossible se réalise.
@CJ : C'est sûr qu'il faut que le boulot qui paie les comptes soit intéressant ou, à la limite, neutre. Le burnout n'est pas tellement générateur de créativité!
Et oui, au fond de notre coeur, on a tous le même rêve ;) Mais faut que ce soit un espoir qui nous fasse avancer, pas qui nous empoisonne et nous rende amer.
L'option 2 me semble davantage libératrice, en tout cas. Elle ressemble à celle que j'ai choisie déjà.
@Le Mercenaire : L'avantage de l'option 2, c'est qu'elle permet de dire "fuck it" à beaucoup de contraintes mercantiles. Quelque chose me dit que ce n'est pas étranger à ton choix ;) (bienvenu ici d'ailleurs)
Haha! J'vais dire comme Vincent: belle argumentation impartiale, Gen ;)
Seul bémol que je note, par contre, c'est quand on suggère que la voie 1 égale vouloir être prolifique à tout prix, au point de revoir nos standards à la baisse afin de poursuivre de vils intérêts pécuniaires.
Cela dit, l'option 2, celle du zen, est séduisante.
@Pat : Le problème avec la voie 1, c'est que l'impératif de payer les comptes se manifeste tôt ou tard... et donc que le désir d'être prolifique au mépris de la qualité risque de se pointer le nez un jour ou l'autre...
De la même façon qu'on nous dit d'être créateur quand on écrit et travailleur autonome quand on négocie nos contrats, je pense qu'on est mieux d'être payés par une job X quand c'est le temps de régler les factures et payé par le plaisir du travail bien fait quand c'est le temps d'écrire.
Avec toujours la possibilité que le travail bien fait paie à son tour... comme un billet de loterie quoi! ;)
Pour commenter comme du monde, il faudrait que je réfléchisse et ça ne me tente pas vraiment.
Comme j'ai plus d'années derrière que devant, ma réflexion serait teintée de mon expérience et je crains fort que ça se résumerait au BESOIN d'écrire. Que sommes-nous prêts à faire ou ne pas faire pour combler un tel besoin, parfois pire qu'un gouffre affectif.
@ClaudeL : Oui, le besoin d'écrire. Besoin que j'ai renié un bout de temps. J'ai fini par lui céder, à mes propres conditions.
Et si tu mets ta réflexion en forme, j'aimerais bien la lire. Justement à cause du nombre de tes années! ;)
Option 2. J'ai trouvé un boulot que j'aime vraiment, dans le milieu culturel, et j'écris un peu. Pas autant que si je n'avais pas de boulot, bien sûr, mais ça me donne un équilibre qui me plaît. J'en avais marre de gagner 10 000$-15 00$/année un moment donné L'âge peut-être. ;-) Sans avoir un salaire mirobolant de PDG je gagne décemment ma vie et il me reste quand même un peu d'énergie pour l'écriture... et les chèques de droits d'auteur servent à du luxe, parce que pas prévu.
@La tête : En effet, un moment donné le salaire d'étudiants, on s'en fatigue. Contrairement à toi, je peux pas dire que j'aime mon boulot, mais il est tolérable. Et il a la grande qualité d'offrir beaucoup de jours de vacances! :p
Option 2, sans hésitation. J'ai besoin de ma petite sécurité financière, et l'écriture doit demeurer un plaisir, pas une corvée. Sinon, ça devient un boulot comme un autre et non merci, ce n'est pas ce que j'attends de l'écriture.
Mais oui, c'est bien de se poser la question et de voir jusqu'où on est prêt à aller dans cette belle aventure!
@Isa : Ouaip, moi aussi j'ai besoin d'une certaine sécurité financière. Sinon je dors pas. Et j'écris pas quand je dors pas! lol!
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