mardi 27 octobre 2020

Ce qu'on ne peut pas écrire en 2020

 Alors, finalement, l'écrivain qui a été accusé de production de pornographie juvénile (cas que j'évoquais dans mon billet "Ce qu'on ne peut pas écrire en 2019") a été acquitté, ainsi que son éditeur. (Et le délai pour faire appel est dépassé, donc on est bien sortis de cette histoire!)

Ouf! C'est un soulagement, on ne se le cachera pas. (Bravo à l'écrivain de s'être accroché. Je le nomme pas pour m'éviter des hordes de troll, mais je lui lève mon chapeau, parce qu'il a traversé des heures crissement sombres alors que le rouleau compresseur de notre système de justice lui passait sur le corps.) On va se poser moins de questions en prenant la plume désormais! 

Suite à ça, qu'est-ce qu'on peut ou ne peut pas écrire en 2020?

J'ai lu le jugement (vous pouvez m'imiter si vous voulez, ou lire un résumé ici) et, à ce que j'en comprends, en gros, avant 2005, un écrit (même artistique) était jugé pédopornographique s'il conseillait ou préconisait les activités sexuelles avec des mineurs. Après 2005, la loi a été modifiée et il suffisait de les décrire. Le juge a trouvé qu'enlever les mots "conseille ou préconise" rendait l'article trop large, portait une trop grande atteinte à la liberté d'expression en fonction du but visé (protéger les enfants en interdisant la porno juvénile) et donc était anticonstitutionnel. (À noter, la nuance entre "décrire" ou "évoquer" n'a jamais été abordée.)

Donc, le juge a suspendu l'application de cet article de loi et, dès lors, il a pu prononcer un acquittement bienvenu. 

Maintenant, mes connaissances de ce genre de cas sont trop floues pour que je puisse vous dire si l'article est invalidé durablement au complet (ce serait étonnant et ça aurait motivé un appel du jugement) ou si c'est juste la modification de 2005 qui est suspendue. Prenez pas de chance, considérez que c'est juste la modification. (Moi c'est ce que je vais faire!)

Alors, suite à la conclusion de cette affaire, qu'est-ce que vous ne pouvez pas écrire en 2020?

- Des incitations à la haine.

- Des atteintes à la réputation, à la vie privée ou à la sécurité des gens.

- Des plagiats.

- Des scènes de sexe avec mineur qui conseillent ou préconisent la pédophilie. 

- Des histoires de pandémie parce qu'on est écoeurés en maudit. (Ah non, ça c'est pas dans la loi! lolol! Mais on pourra exercer notre droit de lecteur de ne pas vous lire! :p ) 

Maintenant, à vos claviers tout le monde!

PS : En passant, ça ne sert à rien de m'écrire pour me dire - en termes plus ou moins injurieux - à quel point j'étais dans le champ avec mon analyse première. 1- J'suis pas juriste, c'était mon exercice de réflexion, pour mes besoins personnels d'écrivaine qui avait pas le goût d'être la prochaine accusée. 2- J'avais analysé les lois qui étaient en vigueur et qui avaient permis l'accusation. Comme ça a pris une suspension d'articles de loi pour prononcer l'acquittement pis que je possède pas exactement cette autorité-là, j'pense que j'étais pas trop perdue! O.o 

4 commentaires:

Prospéryne a dit…

Bien d'accord sur les textes de confinement (même si c'est pas dans la loi!)

Gen a dit…

@Prospéryne : Faudrait l'ajouter lololol

Anonyme a dit…

Pauvre gars: ce procès a dû le détruire. Pire que Kafka !
La machine judiciaire : des rouages qui broient sans pitié tout ce qui lui tombe dans le bec. Une version moins barbare -mais plus longue– du supplice médiéval de la Roue. Malheur au bouc émissaire dont le sacrifice est nécessaire à la bonne conscience des gardiens de l'ordre moral, leur maintien au pouvoir est à ce prix.


Gen a dit…

@Anonyme : En effet, le procès a dû ête une épreuve. Cependant, étant donné le sujet en cause, je vais me garder une petite gêne avant de crier à la manoeuvre politique.