mercredi 28 mars 2018

La dystopie n'est pas une mode innocente (2)

Il y a six ans, je m'étais un peu indignée d'un article de journal qui présentait les dystopies comme "un plaisir d'adolescents heureux qui vivent dans le confort".

J'avais l'impression que ce n'était pas du tout le cas. Que les dystopies poussaient au contraire les jeunes à agir, à réagir, à se conscientiser tôt aux changements climatiques, aux inégalités sociales, bref au mur de béton vers lequel notre société se précipite à fond de train.

En fin de semaine, des adolescents américains ont envahi Washington pour revendiquer un meilleur contrôle des armes et la fin des tueries dans les écoles.

Sur leurs pancartes, on trouvait des références à Harry Potter (une journaliste les a d'ailleurs surnommés "l'armée de Dumbledore"), mais aussi à Hungers Games et à d'autres dystopies. Bref à des romans où les adolescents, coincés dans des mondes qui ne leur conviennent pas, prennent sur eux de changer les choses.

Je ne suis aucunement surprise.

C'est à ça que servent les livres. C'est, surtout, à ça que sert la science-fiction : à tendre aux gens un miroir déformant de leur réalité, en grossissant les défauts à outrance pour que, enfin, on les voit.

... cela étant dit, maintenant que les jeunes sont conscientisés, est-ce qu'on pourrait quand même publier un peu autre chose? :p

7 commentaires:

Alain a dit…

Comme disait le curé de Serge Grenier dans les Cyniques: "Lire, ça donne des idées".

Il y a une énorme pression médiatique/sociale/politique aux États-Unis pour amener les gens à croire que l'état actuel de leur société est inéluctable, qu'il n'y a rien à faire. (Le pire étant les politiciens qui prétendent que rien ne peut empêcher les tueries... alors que les États-Unis sont le seul pays du monde à vivre ça aussi régulièrement).

Pas étonnant qu'a vu le jour tout un courant littéraire basé sur le renversement d'un ordre social corrompu, alors que pendant longtemps la préservation du statu quo était la norme en fiction.

Et maintenant, en exercice au lecteur: quel est le prochain courant littéraire qui pourrait engendrer un mouvement social?

Prospéryne a dit…

Perso, j'aime mieux les dystopies que les histoires romantique à l'excès de vampires... Mais ce serait bien d'avoir quelques utopies maintenant. C'est bien l'espoir aussi!

Gen a dit…

@Alain : Il aura quand même fallu longtemps pour qu'ils constatent le problème!!! C'est pas d'hier qu'ils sont les seuls à vivre autant de tueries me semble (Colombine, j'étais encore au secondaire). Mais bon, l'idée d'un changement possible commence à faire son chemin.

Je sais pas quel sera le prochain courant... un truc post-racial et post-genre peut-être? Entk c'est ce que l'air du temps m'inspire.

@Prospéryne : Le problème, c'est que certaines dystopies sont imprégnées du même romantisme à la guimauve à l'eau de rose! :p

Et le problème avec les utopies, c'est que... ben tu connais le concept "Les gens heureux n'ont pas d'histoire?" ;) Après avoir inventé un monde où tout va bien, on raconte quoi? Que tout ne va pas si bien que ça? Alors ça devient une dystopie! lol!

Alain a dit…

Mais voyons, Twilight est une dystopie!

En tout cas, si mes enfants devenaient aussi insignifiants que les personnages de Twilight, je trouverais ça très dystopique.

Outre la difficulté de situer une histoire dans un cadre utopique, avec notre cynisme social il devient délicat de "croire" en une utopie. Dès qu'on nous la présente, on a le réflexe de se demander ce que l'on nous cache, qui paye le prix pour cette société idyllique...

C'est peut-être ça, l'histoire qui reste à raconter: un monde qui est trop beau pour être vrai... et qui, finalement, est vraiment aussi parfait que ça!

Gen a dit…

@Alain : Ce n'est pas une mauvaise piste, mais je crois que pour que ce soit crédible, il faudrait que ce soit quand même pas si parfait que ça... Genre y'a encore de l'attente aux urgences! :p

Alain a dit…

Imagine: une société parfaite et idyllique... sauf que tous les romans se publient sans aucune direction littéraire.

Gen a dit…

@Alain : Ahhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhh!