Je pense que c'est important qu'une histoire "résonne" quelque part dans l'esprit de l'auteur, qu'elle le touche, qu'il la sente dans ses tripes d'une façon ou d'une autre, bref qu'il ait une raison particulière pour l'écrire. J'ai l'impression que c'est ce qui fait la différence entre un texte correct et un bon texte ou entre un passage fort et le reste du récit.
Pour ma part, ça a toujours été clair : les textes dans lesquels je mettais mes tripes ont souvent été publiés. Les autres, les constructions purement intellectuelles, ont été rejetés. J'ai fini par comprendre le concept.
La question que je pose le plus aux gens qui me font lire des textes, c'est donc "Pourquoi?". Pourquoi as-tu écrit ce texte-là? Qu'est-ce qu'il veut dire pour toi? Ce sont les questions que je me pose devant les textes que je viens de finir (ou même avant de les entreprendre). Mine de rien, ça m'aide souvent à cerner la thématique et à me montrer l'angle que le texte doit prendre.
Le conseil que je donne le plus à date, c'est "Mets tes tripes dans ce que tu écris". Tu te poses des questions sur la vie, l'univers et tout le reste? Ben mets-les dans ton texte. Pas besoin d'avoir des réponses (42!), la question suffit. Parce que si tu te la poses, il y a sans doute un lecteur quelque part qui se la pose aussi. Et donc ton texte va sonner vrai pour lui.
Cela dit, des fois quand on lit ce que ça donne lorsque certains écrivains mettent (enfin) leurs tripes dans leur texte on se dit...
"Wow, ce gars-là est dû pour une thérapie!"
12 commentaires:
Parlant de thérapie... veux-tu en parler? ;) héhéhé
@idmuse : Qu'est-ce que tu penses que je viens de faire? ;p
J'avoue que j'ai un peu de misère quand on sent trop que l'auteur emploie son texte et ses personnages pour exorciser des démons très personnels qui ne me concernent pas, quand tout est prétexte à du « je-me-moi » (j’ai des titres en tête mais je ne les nommerai pas :-))
Dans mon cas (je ne peux parler que pour moi :-p), je sens que le texte que je prépare est potable quand je commence à ressentir de quoi pour les personnages, que j'éprouve de la sympathie pour eux. Parfois c'est parce que je suis parvenu à leur donner un point commun avec moi -- un souvenir, un trait de caractère, etc. qui éveille chez moi une sympathie *viscérale* (même pour le "méchant" :-)) Mais je fais en sorte que le reste soit différent et surtout qu’il puisse évoquer quelque chose de personnel pour le lecteur (i.e. mettre le personnage dans une situation que beaucoup de gens ont affronté). Sans en faire une règle absolue (et sans prétendre que moi je réussis à tous les coups), il me semble que les meilleures histoires que j’ai lues sont écrites par des auteurs qui ne parlent pas juste *d’eux-mêmes* et de *leurs tripes*, mais qui parlent aussi des tripes de *leurs lecteur*, même de façon très indirecte. J’imagine qu’un bon écrivain doit trouver les points communs entre ses trippes et celles des autres :-p
(Houlà, quelle discussion!)
@Phil : Je m'étais peut-être mal exprimée... Je ne veux pas nécessaire dire qu'il faut qu'un texte me touche moi et mon vécu, mais plutôt, comme tu le dis, que je ressente quelque chose en écrivant, ne serait-ce que pour mes personnages. Qu'il y ait des trippes dans le texte, mais pas nécessairement les miennes.
J'pense qu'un bon écrivain doit être capable d'une grande empathie, parce qu'il faut pouvoir se mettre dans les souliers du personnage, même du méchant. (Comme tu dis, faut trouver un point commun entre nos trippes et celles des autres)
Et c'est pour ça que je disais que la question importante me semble être "pourquoi est-ce que tu racontes ça?". Du moment où la réponse est une question de ressenti (le tien ou celui de ton personnage), je pense qu'on tient un bon filon.
Je suis d'accord avec vous deux. Voir les tripes à travers le texte, pas dans le sens de «thérapie», mais dans le sens de «ça soulève la passion de l'auteur, du lecteur».
Je suis très sensible à ça, quand je lis un texte.
Écrire pour comprendre ses démons sans que ça ne verse dans une quelconque écriture-thérapie ou dans une maladroite exhibition de l'intimité, c'est peut-être ça, savoir faire bon usage de ses tripes.
@Pat : Exactement. Faut que ça soulève la passion. Cela dit, je peux apprécier des textes plus intellos, mais on dirait que j'arrive pas à les écrire pour le moment. (Y'a ptêt des tripes que j'arrive pas à voir dans les textes intellos).
@Le Mercenaire : Oui, je pense que ce louvoiement entre le ressenti et le personnel, c'est ça le milieu à viser! :)
(J'ai pas écrit tripes avec deux P partout, hein? Nah, c'est une illusion... ;)
En même temps, écrire avec tes tripes (ou tes trippes, c'est comme on veut, t'sais) c'est surtout écrire avec ce que tu sais, "organiquement", mettons. Un personnage, aussi éloigné soit-il de l'auteur qui l'imagine, va "vivre" si seulement l'auteur lui donne une parcelle de ce savoir organique (appelle ça l'expérience, la vie personnelle, etc.). D'ailleurs, on me faisait remarquer l'autre fois qu'au Québec, on n'écrit pratiquement qu'au je depuis un bon moment. Je me demande si ce recours narratif aide à (ou amoindri l'effort de) viser dans ce milieu dont tu parles.
@Le Mercenaire : Tant qu'à moi, au Québec, il se produit ben du stock au "je", pas juste en littérature (y'a qu'à regarder les films qui sortent dernièrement).
J'en finis par me demander s'il n'y a pas un paquet d'artiste qui ont du mal à prêter leur "savoir organique" (j'aime beaucoup cette image!) à un personnage qui n'est pas eux-même.
C'est peut-être à cause de ce discours qui gagne en puissance depuis un moment, à savoir que l'authenticité est une valeur en fiction. Quelle plus belle preuve d'authenticité que de se mettre en scène, sans aucune distance. Je ne suis pas entrain de mettre au pilori l'auto-fiction mais plutôt la mauvaise fiction qui se réclame de celle-ci.
En tout cas, Gen, tes conseils à propos du pourquoi et des tripes ont trouvé preneur chez moi... Excellent conseil Madame! ;)
@Le Mercenaire : C'est sûr que si on pousse le vieux conseil "écrit à propos de ce que tu connais" à la limite, ça donne des trucs très authentiques, mais sans nécessaire beaucoup d'envergure (ou de valeur littéraire... ou juste d'intérêt). Mais j'ai plutôt l'impression que ce vieux conseil allait plutôt dans le sens des tripes, du vécu organique...
@Isa : Entk, ça t'as fait le même effet de déblocage qu'à moi, c'est clair! :)
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