lundi 27 février 2012

UFC 144 - Faire le poids

Y'a des expressions qui changent de sens selon le contexte. "Faire le poids" en est une. Dans le parler populaire, quand on fait pas le poids, on est trop petit ou trop faible pour l'adversaire auquel on s'attaque. Dans les sports de combat, ça veut dire au contraire qu'on est trop lourd.

En effet, dans tous les sports de combat, les combattants sont répartis dans des catégories de poids. Pourquoi? Tout simplement parce que comme la puissance d'un coup est égale à la masse multipliée par le carré de la vitesse, vous voulez pas des trop gros écarts de poids, histoire que ce soit vraiment la technique (qui donne la vitesse) qui devienne le facteur important. En plus, en combat au sol, faut un écart de poids raisonnable si on veut que la personne coïncée dessous ait une chance de se relever.

Pour s'assurer que les combattants sont dans la bonne catégorie de poids, on leur donne un poids maximal qu'ils ne peuvent dépasser et on les pèse la veille d'un match. En théorie, c'est simple : les gars ont juste à choisir la catégorie à laquelle ils appartiennent selon le poids qu'ils font une fois bien musclés et entraînés...

Seulement, comme je le disais, la masse est importante. Non seulement elle donne de la puissance de frappe, mais en plus un petit surplus de muscle par-ci par-là, ça permet de mieux protéger les organes, de moins sentir les coups... et si on est plus lourd que l'adversaire, il aura de la misère à nous déplacer...

Alors, avec le temps, les combattants se sont mis à tricher un peu avec leur poids. Un gars pesant normalement 180 livres s'inscrivait dans la catégorie des 170 livres et moins. Une semaine avant le combat, il se mettait à manger de la salade et rien d'autre. Il perdait du poids, arrivait à faire 170 livres à la pesée, bouffait trois steaks dans la nuit et, pour le match du lendemain, il avait regagné une bonne partie du poids perdu et faisait donc 5 ou 6 livres de plus que son adversaire. Le stratagème s'est su, le gars d'en face s'est mis à faire pareil... et ça a fait boule de neige.

À présent, ce n'est même plus considéré un stratagème. Une ou deux semaines avant un combat, tous les combatttants font ce qu'on appelle "couper du poids" (weight cut), c'est-à-dire une méga diète destinée à les déshydrater au maximum en plus de les faire maigrir de façon éclair. Ils ajoutent à ça des séances de sauna le jour de la pesée et ils arrivent à diminuer leur poids de 5 livres (pour les plus petites catégories de poids) à 40 livres (pour les poids lourds). Suite à la pesée, ils se remettent à bouffer et à boire beaucoup. Le soir du match, ils sont presque revenus à leur poids normal (qu'on appelle leur walk around weight).

Seulement, de temps à autre, vous avez des gars qui tirent un peu trop sur la corde, qui se musclent trop, deviennent très lourd et n'arrivent pas à perdre tout ce poids de surplus en une seule semaine. Qu'arrive-t-il quand un combattant n'arrive pas à faire le poids? Hé bien on donne le choix à son adversaire : il peut décider de refuser le combat ou de l'accepter contre compensation monétaire (on lui donne une partie du salaire de son adversaire). D'habitude, les adversaires (qui viennent de s'entraîner pendant 3-4 mois en vue du match) acceptent. Le combat est cependant considéré un catchweight (entre deux catégories de poids) et, en théorie, il ne compte pas dans les classements pour se mériter une chance d'aller défier le champion d'une catégorie de poids.

Et d'autre fois, on a des cas où un combattant a tellement essayé de se déshydrater pour faire le poids que les médecins ne veulent pas qu'il combatte.

Heureusement, en fin de semaine, Quinton Rampage Jackson n'a pas réussi à faire le poids (il est arrivé 6 livres trop lourd), mais il a tout de même pu combattre. Ça a permis à Ryan Bader d'ajouter une belle victoire à son palmarès.

À part ça, le mot d'ordre du UFC d'en fin de semaine fut : Vive le taekwondo!!! (Anthony Pettis et Ben Henderson ont montré que c'est l'art martial à étudier pour savoir comment donner des vrais bons coups de pied... et qu'un coup de pied, c'est bien plus dévastateur qu'un coup de poing en combat!)

9 commentaires:

Vincent a dit…

En effet, belles démonstration de taekwon-do dan ce gala. C'est étonnant comme les temps changent. Il n'y a pas si longtemps, tout le monde en avait uniquement pour les coups de pieds de la boxe thaï, mais là, les coups de pieds de taekwon-do commencent à être respectés. Il était temps!

Gen a dit…

@Vincent : Faut dire qu'on commence tout juste à voir des combattants qui savent comment les placer ces fameux coups de pied! :) Le taekwondo, c'est comme le reste : faut en faire depuis une bonne dizaine d'années pour que ce soit efficace! :)

Isabelle Lauzon a dit…

Intéressant, je ne connaissais pas ce concept de "faire le poids". Ça doit être stressant en diable pour ces pauvres gars-là, qui en viennent à calculer tout ce qu'ils bouffent... Et ils doivent être supportés par des "spécialistes" de la chose, je suppose... Mon constat : c'est triste, d'en arriver là. Tout comme de tomber dans l'enfer des stéroïdes. Un moment donné, on pousse le bouchon un peu trop loin... :(

Valérie a dit…

Je connaissais cette technique, mais je me demande tout le temps: pourquoi on ne pèse pas les combattants tout de suite avant le combat et non pas une journée avant? Ça les empêcherait cette tricherie qui m'énerve et qui détruit leur santé, très certainement!

Vincent a dit…

@Valérie: En fait, tu sous-estimes la volonté des combattants d'être les plus gros. J'ai ouï que ça s'est déjà fait: une pesée la veille et une pesée juste avant les combats. Ça donne que les combattants ne se réhydratent pas avant le combat pour quand même être les plus gros et là ça devient encore plus dangereux.

Gen a dit…

@Isabelle : En même temps, calculer tout ce qu'ils bouffent en tout temps et avoir une alimentation ajustée scientifiquement pour répondre à leurs besoins, c'est pas mauvais pour ces athlètes-là.

Par contre, oui, c'est triste pour ceux qui poussent la coupe de poids trop loin et qui mettent leur santé en jeu.

@Valérie : Comme le souligne Vincent, l'expérience a démontré que la plupart des gars préfèrent prendre des risques avec leur santé pour s'assurer l'avantage.

Cela dit, je me demande si on ne devrait pas à nouveau essayer la pesée immédiatement avant le combat : certains combattants qui ne coupent pas beaucoup de poids (Frankie Edgar en particulier) ont démontré dernièrement que leur endurance physique est supérieure et permet de surmonter bien des désavantages de masse. Peut-être que les autres combattants accepteraient de les imiter...

Mais il faudra revoir les catégories de poids, sinon on va se retrouver avec des champions qui ne pourront plus faire le poids pour défendre leur titre!

Gen a dit…

@Vincent : Ça s'est effectivement fait à la boxe. Mais je me demande si au MMA les gars prendraient le risque d'arriver déshydratés...

Isabelle Lauzon a dit…

Tsé, me semble que si t'es pas au meilleur de ta forme, tu as moins de chances de gagner ton combat...

Gen a dit…

@Isabelle : En effet, mais si le gars en face est dans le même état, ça s'annule. Et il y a des gens qui récupèrent mieux que d'autre de la déshydration. Le truc pour les combattants est de calculer combien de poids ils peuvent se permettre de perdre rapidement...

Des fois on dirait que la coupe de poids est devenue un art martial à part entière!