Je discutais avec un ami l'autre jour. Il était tout content de me dire que son fils allait bien à la garderie. Que les éducatrices sont tellement bien formées pour stimuler les petits. Qu'elles les sociabilisent tellement bien. Que son fils suit parfaitement les courbes d'apprentissage. Que bien sûr, il ne parle pas beaucoup, mais que c'est normal. Oh, il y a bien un couple d'ami dont la fille parle déjà énormément plus, mais c'est parce qu'elle est toujours avec sa mère et son frère plus âgé. Elle a de l'avance là-dessus, mais elle aura sans doute des lacunes ailleurs plus tard. La mère n'est pas une éducatrice après tout.
Je l'écoutais parler et j'ai senti le poids du désespoir s'abattre sur moi. On en est rendus là? On est rendus à ce point de professionnalisation où on pense qu'une mère n'est pas qualifiée pour élever ses enfants? Et là on ne parle pas d'une femme des milieux défavorisés à qui les enfants sont arrivés par accident! Je parle d'une femme éduquée, qui a lu ses livres de développement de l'enfant et sacrifié sa carrière pour élever ses rejetons soigneusement planifiés et ardemment désirés!!!
Ok, les éducatrices sont formées pour éduquer les enfants. Ok, c'est leur job. Mais on va être francs 5 minutes là. Pensez à votre boulot. Pensez à toutes les fois dans une journée où vous tournez les coins ronds. Où vous n'êtes pas aussi perfectionniste que vous le pourriez, parce que personne ne va s'en rendre compte. Pensez aux appels que vous retournez avec un peu plus de retard que prévu. Aux dossiers qui attendent parce que vous devez traiter d'autres urgences. Aux collègues et clients avec lesquels vous êtes secs un matin, parce que vous avez mal dormi.
Non, n'essayez pas de pousser les hauts cris en disant que vous ne faites jamais ça. Allez mentir ailleurs, s'il-vous-plaît. Faites un vrai examen de conscience. Je suis sûre que vous allez trouver des occasions où vous vous êtes dit "Bah, c'est juste la job" ou "Pourquoi est-ce que je me défoncerais au salaire où me paye?".
Maintenant, soyons réaliste : pensez-vous vraiment que les éducatrices de garderie sont immunisées contre ce genre de réaction? Pensez-vous vraiment que parce que c'est leur job d'éduquer des enfants, elles font nécessairement mieux qu'une mère "qui n'est pas formée pour"?
Si oui, vous devez être heureux : notre société est faite pour vous. Moi ça me donne envie de vomir.
19 commentaires:
Merci pour ce message, tu peux pas savoir comment de lire un contre-poids à certaines choses peut faire du bien.
Ce que tu dis est vrai, mais en plus il ya le nombre des enfants. essaierais-tu d'écrire 7 romans à la fois ? ou 10 ? car c'est cela la garderie, c'est le groupe de 7 ou 10 jeunes, le même horaire pour tous, la promiscuité, le bruit, le partage de l'attention, le partage des jouets, etc.
Je sais que parfois on doit y avoir recours, mais de là à valoriser plus ce choix que celui de la mère ou le père qui a l'amour, l'affection, la connaissance de la personnalité unique de l'enfant, la flexibilité, le temps, etc
Mes enfants je les ai gardé avec moi, par amour, j'ai fait de la peinture, du coloriage, de la pate à modeler, du bricolage, des boucles, de la cuisine, de la lecture, de l'écriture, des jeux dehors, etc.
Les 3 allaient à la garderie une journée par semaine, l'ainé détestait cela, sa vie aurait pénible si on lui avait imposé cela 5 jour sur 5. Il n'était pas le seul enfant ainsi, mais les autres avaient pas le choix.
Comme individu, c'est pas tout le monde qui aime les groupes, la socialisation forcée, le bruit et le partage imposé. Ce matin je suis seule à l'ordi pas un bruit avec mon café et la sainte paix, mon fils a donc de qui retenir.
Et l'ainé à pu développer sa sociabilité à son rythme et selon sa personnalité.
Et pour ce qui est des compétences académiques, aucun n'a eu de problème.
@Éléonore : J'avais envie d'écrire un contrepoids en effet. Je pense personnellement que les deux options se valent. Que pour certains enfants, certains milieux, une option sera mieux que l'autre.
Et j'ai du mal avec la nouvelle tendance qui impose. Impose le travail des deux parents, impose la garderie, impose la tyrannie des courbes d'apprentissage, des moyennes, etc...
Comme j'ai dit ailleurs, je ne sais pas de quoi ma propre vie de maman aura l'air (ni même si elle pourra exister). Mais une chose est sûre : je m'interroge et je veux pouvoir choisir.
Ah! La grande question. C'est un sujet qui fait couler beaucoup de salive chez nous et qui est la source de nombreuses montées de lait de la part de ma chérie. Je me permets de reprendre son discours, car je suis bien d'accord avec elle. Quand elle leur dit qu'elle travaille à la maison et qu'elle s'occupe de notre fille, les gens commencent par la louange en disant: "comme c'est merveilleux, elle n'aura pas tous les microbes des garderies, elle va passer du temps avec sa maman, elle ne sera pas contrainte par des horaires bizarres, c'est vraiment super..." Puis viennent inévitablement les commentaires négatifs... "Elle passe tout son temps avec des adultes, comment elle va apprendre à socialiser avec les enfants?" Gang de caves! Ah c'est une bonne idée, mais ce n'est pas vraiment la norme de nos jours alors on trouve des défauts et des raisons de critiquer. Et pour ce qui est de la socialisation, la petite adore voir des enfants et elle est souvent moins gênée que les enfants soi disant socialisés qui passent leurs semaines à la garderie.
En tant que parent, il faut prendre ses décisions et les assumer. Je suis vraiment content que mes deux pitounes passent leur journée ensemble, même si parfois la maman est un peu (ou beaucoup) fatigué quand je reviens du travail.
@Fred : Ce que je trouve drôle là-dedans, c'est que tout le monde a l'air de considérer qu'un enfant qui passe la majorité de son temps avec d'autres enfants, eux aussi en apprentissage de sociabilisaiton, va développer ses habiletés par magie.
J'envie ta blonde. Si ma carrière d'écrivaine peut décoller, je pourrai ptêt faire comme elle : travailler ET élever ma petite famille à la maison. Le meilleur des deux mondes quoi.
... et c'est pas mon chum qui s'en plaindrait. Y'a pas à dire : quand y'en a un des deux qui passe ses journées à la maison, c'est tellement moins de stress pour celui qui travaille à l'extérieur. La bouffe est faite, le lavage est plié (si si!), etc... Peu importe qui se tape les tâches ménagères, ça reste que quand c'est bien fait, c'est un boulot à temps plein!
Oui, si on pouvait se le permettre, ce serait merveilleux.
@Gen et Vincent: Par contre, il ne faut pas s'attendre à trop travailler pendant la journée. Les jours où la petite laisse ma blonde travailler quand elle est réveillée sont exceptionnels (quoi que ça s'améliore tranquillement). La rédaction/révision demande beaucoup de concentration. La plupart de son travail se fait le soir et la fin de semaine, et c'est pas toujours bon pour le moral...
@Fred : Heu... la différence avec mon horaire actuel serait... ? :p Ah oui : j'essaierais pas de me concentrer sur un roman ET de faire le reste en même temps ;)
"... et c'est pas mon chum qui s'en plaindrait. Y'a pas à dire : quand y'en a un des deux qui passe ses journées à la maison, c'est tellement moins de stress pour celui qui travaille à l'extérieur." exact ! C'est par le temps que je peux dégager sur les taches domestiques que NOUS avons pu tous les deux donner du temps en bénévolat, mon chum comme coach en patin de vitesse et moi comme administratrice du club en question.
Et c'est aussi sur ce temps que nous avons pu encadrer et permettre que nos enfants se rendent sur la scène provinciale et nationale en patin de vitesse et en course.
Et c'est peut-être à cause de ce moindre stress que nous sommes toujours en couple et non séparé comme beaucoup de gens autour de nous.
Pour ce qui est la sociabilisation, élevée au rend d'objectif ultime du discours pro-garderie, il faut savoir qu'avant 3 ans aucun enfant ne sociabilise, il joue à côté de, mais non avec.
Passé 3 ans les besoins de sociabiliser son variable à chacun. Il s'accompagne d'un intense besoin de sécurisation, de routine et de calme.
Bien peu de parents passent une journée avec leur enfant à la garderie, je l'ai fait et ces soirs là, à 20 h j'étais au lit !
@Éléonore Content d'entendre les infos à propos de la sociabilisation avant 3 ans. Ça a bien du bon sens.
Ayant passé 10 ans à la maison à temps complet pour mes enfants, avec très peu de regret, ne me demandez pas ce que je trouve le mieux... ;) Mais bon, comme dirait plusieurs nioufs de ma connaissance, moi j'avais une bonne raison de le faire, mon fils avait un cancer!!! (yeux au ciel) Ces gens semblent oublier que c'était avant tout un choix, et ce, bien avant la naissance de Cédric. Heureusement, puisque que, au moment où c'est devenu une nécessité, on ne s'en est même pas aperçu... Et puis, comme le mentionne si bien Éléonore, ça nous a permis de traverser bien des tempêtes et d'être toujours en couple! Il y a un lien de cause à effet certain selon moi...
Le problème, comme le mentionne Frédéric, c'est que ce n'est pas la norme. Et quand on sort des rangs et qu'on l'assume, ça dérange. Beaucoup. Surtout quand on a un diplôme universitaire! Que de fois je me suis fait dire que j'avais étudier pour rien (haussement de sourcils) et que je devrais avoir honte, dans la société actuelle, de ne pas travailler à l'extérieur...
Les gens pensent que les femmes à la maison ne travaillent pas, passent leur journée devant les «soap» américains et se font vivre par leur conjoint - parce qu'abattre les tâches ménagères et s'occuper des enfants ça ne compte pas! Mais ne t'en fait pas Gen. Aujourd'hui, alors que je suis toujours à la maison, puisque j'écris chez moi, la nouvelle remarque que l'on me fait c'est : «Est-ce que tu vas retourner travailler POUR DE VRAI un jour?» Romancière, ce n'est pas un vrai travail parce qu'écrire, c'est un loisir... Décidément, faut croire que je suis née pour choisir ce qui paraît le moins bien aux yeux de la société ;) Encore heureux que je m'assume! :)
@Elisabeth: "Retourner travailler pour de vrai". :o Les bras m'en tombent!!! Quel culot tout de même de dire une chose pareille, c'est pas croyable...
@Éléonore : Ça rejoint ce que j'avais entendu dire également. Et en effet, le stress moindre, ça reste que c'est bon pour le couple. ;)
@Élisabeth : Dans un monde idéal, je ferais les mêmes choix que toi. Malheureusement, on doit rester près de Montréal alors l'hypothèque astronomique nous force plus ou moins à avoir deux salaires. Mais si ma carrière peut décoller, je retravaillerai plus JAMAIS "pour de vrai"
@Vincent : J'pense que c'est pas du culot, mais de la jalousie! :P
@Vincent: Gen a peut-être raison au niveau de la jalousie... ;)
@Gen: Eh bien, je te le souhaite ce monde idéal! Sincèrement.
Pour ce qui est des l'hypothèques, elles sont astronomiques par ici aussi. La différence, c'est que j'ai acheté il y a près de 13 ans. Le marché n'était pas du tout le même qu'aujourd'hui... :(
@Élisabeth : Sans blague, qui a ENVIE de se lever à tous les matins, de s'habiller pour correspondre à un standard X, d'endurer un patron, des collègues, etc... Je crois que tous ceux qui te disent que tu travailles pas pour vrai veulent juste dire que tu n'endures pas les brimades du monde du travail :p ... et ils aimeraient être à ta place! (entk, moi j'aimerais! hihihi)
Ah oui, y'a ce détail-là aussi (le facteur "marché devenu débile dernièrement") à propos des hypothèques. Enfin, bref, faut deux rentrées d'argent.
Vous me donnez le goût de relire "Môman travaille pas, a trop d'ouvrage".
80)
Audrey Dit : J'ai toujours dit que tôt ou tard, les garderies allaient devenir obligatoire pour tous les enfants.... comme la maternelle.
Je pense que certaines éducatrices de garderie font mieux que certaines mères et certains pères. Ce n'est pas parce qu'on a mis un enfant au monde qu'on a nécessairement envie de passer 24 heures sur 24 avec pendant des années. Il y a des parents qui ont des carrières intéressantes, stimulantes, valorisantes et qui ne voient pas pourquoi ils auraient à quitter leur gagne-pain pour élever à plein temps leur enfant alors que des ressources compétentes sont là pour prendre la relève pendant qu'ils travaillent.
Et tous les parents à la maison ne sont pas automatiquement de bons parents, dévoués et stimulants pour leur progéniture, qui aiment bricoler et leur lire des histoires. Il y a un taux élevé d'enfants à domicile qui sont parqués devant la télévision, oui, même chez les mères instruites qui ont lu plein de livres et ont "sacrifié leur carrière" pour leur progéniture. L'esprit de sacrifice, ça ne fait pas des gens bien heureux, vous savez. Vous avez une vision très idéalisée de la maternité à temps plein et très négative des éducateurs en garderie.
Vous dites qu'au travail on tourne parfois les coins ronds, ce qui serait inacceptable quand on s'occupe d'enfants. Pensez-vous vraiment qu'un parent au foyer ne tourne jamais les coins ronds, lui ou elle? Que ce parent est toujours patient, à l'écoute, stimulant, doux et souriant?
@Luc : Ça reste représentatif de certaines réalités! ;)
@Audrey : Partis comme on est là, effectivement, ça va finir par arriver
@Femme libre : Je pense que la majorité des gens qui choisissent (j'insiste sur le terme "choisir") d'élever leurs enfants au foyer le font très bien. Idéaliste, peut-être, mais selon mon expérience on fait toujours mieux les choses quand on les fait pour soi-même ou ses proches que quand on travaille pour un employeur.
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