L'autre soir, Vincent, découragé (entre autre par les derniers impôts régressifs, par ses employeurs qui le pressent comme un citron... et par des gens riches qu'on connaît bien et que ne parlent que de moyens de s'enrichir encore davantage), m'a demandé de remuer mes neurones d'historiennes, d'analyser froidement notre monde actuel et de tenter de prédire quand les choses changeraient enfin. Si on pouvait espérer que la classe moyenne améliore un peu son sort et cesse de servir de vache à lait aux riches (vaches tellement déshydratées qu'elles sont menacées d'extinction).
J'ai essayé de réfléchir en historienne. D'analyser ce qui a mené et ce qui a annoncé notre seule révolution précédente, la Révolution tranquille, celle qui a permis la prise de pouvoir d'une nouvelle classe politique, la montée de la classe moyenne et la création de notre filet social actuel, qu'on dit trop cher à présent, mais qui répondait à un immense besoin.
Difficile, pour une historienne, de faire des prédictions. Difficile aussi de voir venir une révolution sans violence. Il n'y a pas d'actes de terrorisme, pas d'assassinat politique...
Voyons voir... Avant la Révolution tranquille, nous avions Duplessis au pouvoir. Un homme qui maintenait le Québec dans l'immobilisme, qui plaçait ses amis au pouvoir, qui faisait de grands cadeaux à l'industrie... Sous son règne, les gens s'appauvrissaient, les journaux péréclitaient, se faisaient fermer... Après la mort de Duplessis, les dessous scandaleux de sa politique ont été révélés...
L'autre soir, je n'avais pas de réponse encourageante pour Vincent. 2013, ai-je dit, comme les analystes financiers. Ce sera sans doute ça la date charnière. Le moment où les riches devront faire des concessions s'ils veulent continuer à avoir du personnel compétent pour faire tourner leurs industries.
Cependant, aujourd'hui, entre le Journal de Montréal en lock-out, les scandales reliés au milieux de la construction et les révélations récentes de Bellemare, je commence à me dire que la conjoncture en rappelle une autre et qu'on verra peut-être les choses bouger plus vite que prévu...
28 commentaires:
Je ne suis ni historienne ni voyante, mais à regarder en arrière, dans les vies des personnes qui ont gravité dans mon entourage: parents, grands-parents, arrière.... et à regarder un peu en avant: nièces, neveu, amis, je dirais que la classe moyenne (qu'est-ce que la classe moyenne?) n'a pas tellement changé et ne changera pas non plus, au sens où les revenus augmentent mais les dépenses aussi. La différence c'est qu'il faut se ramasser de l'argent pour vivre plus longtemps que nos aïeux.
À part ça, je suis bien incapable de résumer en quelques lignes ce que des analystes prennent toute une vie, des tonnes d'articles, de dizaines de livres pour expliquer les tenants et aboutissants.
Bref, je n'en sais rien. Je sais juste qu'on n'est jamais content de ce qu'on a, on en voudrait toujours plus et que, certains jours, je suis bien contente d'avoir ce que j'ai et que je veux surtout être qui je suis.
@ClaudeL : Pour ma génération, la question n'est même pas de vouloir plus, mais d'espérer préserver les acquis. Au rythme où le prix des denrées de base augmentent (alimentation, électricité... et impôts!) alors que nos salaires stagnent (augmentations moyennes dans les 5 dernières années pour les travailleurs de ma génération? 8%, selon les analystes de Desjardins, soit beaucoup moins que le coût de la vie), je ne sais même pas si ceux qui sont propriétaires maintenant pourront conserver leur maison dans 5 ans!
Pendant ce temps-là, le gouvernement gaspille des millions en contrats douteux et donne des sinécures à ses amis.
Il faut que ça change.
Comme Gen le dit, on est pas du tout dans une situation où on en veut plus. On veut juste ne pas perdre ce qu'on a.
Et à voir ce qui se profile à l'horizon, je n'ai pas l'impression que ce sera possible. Ou alors ça va être difficile. À regarder comment vont les choses aussi, on se demande ce que nos éventuels enfants vont faire pour avoir l'équivalent de ce qu'on a.
En théorie, les familles sont sensés s'enrichir à chaque génération qui passe, mais là pour notre génération c'est le contraire, on s'appauvrit de plus en plus.
Un seul mot: révolution.
Oui, mais quand?
En fait je me demande: par qui? Comment? Quand?
Réponse : On ne peut qu'attendre, voir venir... et embarquer dans la vague ;)
Probablement quand la population avec des salaires moyens va disparaître. Quand il ne restera que les pauvres et les riches. Idéalement, il faudrait que ça change drette là, mais il y a de quoi qui nous retient. J'arrive pas à mettre le doigt dessus.
Au fond, je me demande si la dépolitisation de la population ne sert pas les politiciens (ne pas confondre "les politiciens" avec "le système politique") parce que moins la population porte attention aux agissements du gouvernement, plus le gouvernement a de la marge de manoeuvre avant que la population se rende compte qu'elle se fait avoir dans les grandes largeurs.
C'est peut-être juste ça qui nous retiens? La population n'est pas interessée à ses dirigeants.
Faut dire aussi qu'on est pas vraiment de nature belliqueuse ici. On a jamais décapité de gouvernement... Est-ce que ça nous rend amorphe et, moutons, à l'image de notre premier ministre de l'heure?
Ne sommes-nous pas le seul peuple qui a fait une révolution...mais tranquille?
Je crois que nous faisons erreurs de se désintéresser de la politique, ça fait de nous des mous..tons. Et je suis un de ceux qui zap quand je vois un politicien à la télé.
@Pat : Oui, nous sommes le seul peuple à avoir fait une révolution "tranquille" de l'ampleur de celle que nous avons vécue.
Par contre, zapper les politiciens et se désintéresser de la politique, cela me semble deux choses différentes. Les politiciens prononcent des paroles creuses 99% du temps (et les mauvaises langues diront qu'ils mentent le reste du temps). C'est dans les analyses des journalistes de la presse écrite qu'on peut trouver quelques vérités.
Vous connaissez une classe moyenne heureuse de son sort? Vous connaissez un système politique qui est un modèle? Toi l'historienne, tu devrais savoir que le pendule fait passer du capitalisme au socialisme au communisme, à tous les "isme" même les schismes pour revenir au point de départ. Pour que les révolutions changent quelque chose, elles doivent plutôt ressembler à des guerres qui chamboulent tout et ne rendent pas nécessairement la vie plus belle à la classe moyenne.
Ça ne veut pas dire de se taire, de ne rien faire. Les gens n'ont jamais tant eu la parole facile, accessible. L'opinion de monsieur et madame Tout le monde n'a jamais été tant sollicitée et prise en considération comme si c'était parole d'analyste.
Wow, ça commence à pointer du doigt ici. :P
Je ne pense pas que même si l'opinion de tout un chacun est plus accessible en ce moment, ça soit nécessairement prit en compte. L'abondance et la facilité d'accès à l'information c'est une forme de censure aussi. Les informations pertinentes sont noyées dans l'écrasante masse des informations sans intérêt.
Cela dit, ce n'est pas parce qu'il n'existe pas de "système politique modèle" ou même un "meilleur système politique" qu'il faut se satisfaire de celui qu'on a. Si on veut avoir mieux, on est mieux d'inventer et de revendiquer des améliorations. Celui qui n'évolue pas disparaît.
@ClaudeL : En effet, il n'existe aucun système parfait. Mais c'est le jeu du balancier qui permet justement d'atteindre un certain équilibre. On est rendus loin dans le capitalisme, malgré les couleurs de socialisme dont il se part (en cachant le fait que c'est un socialisme cheap, qui ne veut surtout pas entrâver la libre entreprise). Il est temps que ça reparte dans l'autre sens.
@Vincent : En effet, il n'y a rien qui noie l'information aussi bien que sa surabondance. Le droit de parole universel actuel donne à chacun l'illusion qu'il peut être entendu. Or, rien n'est plus faux.
La preuve? Présentement, j'ai l'air de défouler mes angoisses devant un vaste public. Mais, en réalité, on jase à quatre. On pourrait être chez moi autour d'une pizza. ;)
Bien d'accord, sur tout.
J'espère que je n'ai pas "pointé du doigt" trop fort? Je parlais pour parler.
Je suis de la génération qui a connu la fin de Duplessis, la révolution tranquille, les collèges classiques, le début des polyvalentes et des cégeps, l'arrivée du RIN, la montée de l'espoir avec René Lévesque et sa belle gang, tous les référendums, la mort de mon père qui aurait bien voulu avoir un pays avant de partir et, hélas, depuis quelques années, le piétinement-sur-place. Pas découragée, mais disons que je passe le flambeau, je mise sur la relève: vous.
Tiens, on écrivait en même temps. La pizza? Trop tard, j'ai diné!
Et jasé à quatre, c'est déjà mieux que certains facebookiens qui jasent tout seul!!
Et puisque moi je peux, vais aller dehors voir le soleil.
Pour ce qui est de la classe moyenne heureuse de son sort, non, il n'y en a jamais eu.
La classe moyenne, depuis sa création, c'est la vache à lait : elle s'endette pour s'éduquer, puis travaille pour payer ses dettes pendant qu'on s'enrichit sur son dos.
Dur d'être heureux de son sort.
Sauf qu'il y a des classes moyennes qui ont regardé vers le haut en se disant "je veux être riche moi aussi". Tandis que là, je pense qu'on commence à réaliser que conserver nos acquis, ce serait déjà ça la richesse. Les conserver et les faire partager.
Bon, j'ai écrit en même temps que Gen.
Pizza? trop tard, j'ai déjà diné.
Jaser à quatre, c'est mieux que certains Facebookiens qui jasent tout seul.
Puisque moi je peux, je vais lire dehors, au soleil. Revue de camping.
@ClaudeL : De notre point de vue, tu es de la génération chanceuse, dont la grande déception est de ne pas avoir eu un pays. Vince est moi sommes de la génération qui voit les acquis s'écrouler les uns après les autres devant nous.
Éducation gratuite? Fini. Santé gratuite? Fini. Fonds de pension gouvernemental? En faillite. Accès à la propriété? Pas fini, mais presque. Marché du travail? Prenez ce qu'on vous offre, sinon on s'en va en Inde. Syndicats? Ils demandent des hausses de salaire quand on veut des vacances, des fonds de pension quand on veut des garderies, protègent l'ancienneté dans un marché où on change de job aux trois ans...
Nous passer le flambeau d'accord, merci. Par contre, pas sûre qu'on fera ce que vous aviez prévu avec ;)
L'heure est aux politiques mondiales, aux mouvements coopératifs, aux plafonds salariaux. C'est pas pour la survie du français qu'il faut lutter, mais pour celle de l'humanité.
Bon soleil ClaudeL :) T'as raison : les parois grises d'un cubicule, c'est sans doute pas bon pour mon moral.
Miam pizza! :)
Bof, pour pointer du doigt: j'ai juste trouvé ça comique le "Toi, l'historienne". haha!
Hum, le pays, c'est pas demain la veille.
Mais je ne vois pas trop en quoi ça améliorerait notre sort d'en avoir un. Je pense que se battre pour son indépendance (ou souveraineté ou autre) sur une planète où tout tend à se mondialiser, c'est investir son énergie à un mauvais endroit. Plutôt que de s'isoler, on devrait plutôt chercher à prendre le contrôle de l'ensemble!
Mou-hahaha! *rire diabolique*
Wow, chérie je vote pour toi.
J'allais élaborer sur le point des politiques mondiales avant tu en parles, mais j'étais vraiment partie sur une balloune. :p Alors j'ai effacé avant d'envoyer mon billet.
Tout à fait d'accord pour les priorités pour lesquelles lutter. Mais d'ici à ce que les Y prennent le pouvoir, il va couler beaucoup d'eau (polluée) sous les ponts.
Les X n'ont jamais eu leur place au pouvoir (on regarde Mario Dumont... ouch!), les Y ne sont pas prêt d'arriver dans le portrait non plus. J'espère que lorsqu'ils vont y arriver, il seront assez énergiques pour améliorer notre sort à tous, assez cyniques pour être terre à terre et assez conscientisés pour léguer mieux que ce qu'ils auront reçu. Comme le dit le fameux proverbe amérindiens: on n'hérite pas de la terre de nos parents, on l'emprunte à nos enfants.
Si j'étais religieux je prierais pour ça. Malheureusement, je ne le suis pas. Il ne me reste qu'à attendre et espérer.
Espèce d'ex-étudiante de l'UQAM frustré de la mort de Chartrand toi! (Ça se veux un compliment)
Je dit ça tout bonnement mais 2012 vas être très possiblement une année d'élection fédéral et provincial. Donc ouais on peu s'attendre à un changement de cap partiel en 2013. :)
Pour rajouté à ce que dit Vincent, la 'dépolitisation' sert généralement au parti au pouvoir si on ce fit aux intentions de vote au grand désarrois de politiciens qui voudrait p-e un peu changement. Mon bon: "Si tu veux interressé le monde à la politique, réinstaure la conscription"
Pendant ce temps l'espérence de vie en amérique du nord descend et je pleure qu'on utilise "survi" pour le français en province.
La planète malade d'humanité.
Mets-en, mon héros est mort!
Mais l'Uqam, c'est la gaugauche déconnectée des réalités tant qu'à moi. Celle qui voudrait que tout soit gratuit pour tous tout le temps, comme si l'argent poussait dans les arbres.
lol! En effet, la conscription, c'est une bonne façon d'intéresser les gens à la politique.
Mais je ne pense pas que 2012 va être une année de changement. Je pense au contraire que les gens vont ré-élire les mêmes gouvernements, puis que, dans les années suivantes, ils vont réaliser leur gaffe.
On a pas fini de galérer, mais on devrait voir les changements de notre vivant. ;)
@Pat : Ou "Billets première rangée pour la fin du monde"
C'est le titre d'une nouvelle de Daniel Sernine, y'a peut-être écrit ça pendant la révolution paisible.
Ah, ça me disait quelque chose aussi... Peut-être en effet.
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