Écrire n'est pas une thérapie.
Si vous avez des problèmes, ce n'est pas en écrivant des histoires où vous vous vengez de ceux qui vous font la vie difficile que vous allez les régler (même si des fois ça défoule!).
Si vous n'êtes pas bien dans votre peau, ce n'est pas en créant un héros doté de toutes les qualités qui vous manquent que vous vous sentirez mieux. En plus, votre héros risque de sentir la projection à plein nez!
Et, surtout, si vous vous mentez à vous-mêmes, par exemple si vous vous dépeignez comme serein alors que la jalousie vous mine, vous écrirez des personnages antipathiques ou en carton, qui s'illusionneront à leur tour sur eux-mêmes. En effet, comment pourriez-vous mettre en scène des personnages dont les actions et les émotions sonnent justes si vous êtes incapables de voir vos propres motifs? D'assumer vos propres motivations?
Plus je progresse, plus je commence à penser qu'un bon écrivain doit être capable de se regarder sans complaisance, de reconnaître ses faiblesses, d'analyser ses réactions, même quand elles sont mesquines, méchantes, égoïstes, etc. Parce que si vous ne savez pas qui vous êtes ou que vous n'êtes pas en paix avec vous-même, la première critique qui va mettre en lumière le fait que les défauts de votre texte viennent de vos propres lacunes va vous faire l'effet d'un coup de masse. Alors que si vous vous connaissez et vous acceptez bien, vous allez retrousser vos manches et travailler... à la fois sur le texte et sur vous-mêmes.
Écrire n'est pas une thérapie. Mais je commence à me dire qu'on est mieux d'être prêts à en faire une avant d'empoigner la plume!
20 commentaires:
Je pense que l'écriture, ça prend un peu de tout. On y met le bon et le mauvais, ça sort malgré nous, parfois. Personnellement, j'aime avoir des personnages près de la folie, impoli, blasé ou froid. Et pourtant, c'est loin de moi. Mais ça ne veut pas dire que d'autres ne m'inspirent pas.
Ou alors je suis pour les mois multiples ;)
Ce que je voulais dire, c'est que tu es mieux de te demander tout de suite pourquoi tu aimes les personnages près de la folie, impoli, blasé ou froid. Comme ça tu seras pas surprise si un critique met le doigt sur la raison et l'étale au grand jour! hihihihi
Ça me rappelle ce qui était véhiculé dans les années 1960-70: tu ne peux pas bien écrire à 20 ans parce que tu n'as pas encore vécu. Comme si tu ne pouvais pas parler des sentiments qui habitent une mère si tu n'as pas enfanter. J'avais beau me dire que ce genre d'arguments ne tenaient pas la route puisque alors je ne pourrais jamais écrire un personnage masculin puisque je suis une femme, je sais que ça me ralentissait.
J'ai persévéré et ça donne ce que ça donne.
Je pense qu'on écrit différemment à 20 ans d'à 60. Et des fois oui, c'est une catharsis.
Et qui a révélé quoi au grand jour???
@ClaudeL : Je pense qu'en effet on ne doit pas écrire de la même façon à 20 ans qu'à 60. Par contre, je pense surtout que dans les deux cas, si on n'a pas un minimum de capacité d'auto-analyse, on n'arrivera pas à écrire "juste", parce qu'on aura du mal à se projeter dans des situations non-vécues (ou même à utiliser les situations vécues).
J'ai déjà vu des gens en classe de création (au cégep) se faire dire "tous vos personnages sont passifs" et la personne de se replier sur elle-même en murmurant "non, pas tant que ça". Et le prof de constater "ah bon, je vois pourquoi"... Ouch! La personne visée n'était pas prête à admettre son attitude passive, alors mettons qu'elle a séché une couple de cours après ça!
Plus j'y pense, plus je pense que justement écrire (comme lire aussi peut-être à moindre degré)est une thérapie. Au sens où ça t'apprend à te connaître et même à t'aimer. Cesbron écrivait souvent pour exorciser ses démons, voir clair dans ce qui l'émouvait, le dérangeait.
Une grande question que tu soulèves ici.
Tu en soulèves deux en fait, la deuxième étant: que fait-on avec les remarques que les autres nous envoient?
@ClaudeL : Je sais pas... Ce qu'on écrit, on l'a déjà cogité, non? Donc la thérapie est faite. Enfin... c'est mon impression.
Pour ce qui est de "quoi faire avec les remarques qu'on nous envoie", je pense qu'il ne faut surtout pas les balayer d'un revers de la main lorsqu'elles nous dérangent. ;)
On ne les balaie pas, on écrit à leur sujet, hihi!
Mais sécher des cours, c'est aussi réagir, qui dit que l'élève n'est pas parti écrire dans un coin. Penser aux petites souris d'Henri Laborit.
Je dirais qu'il est faux que tous nos personnages nous essemblent à quelque part. Peut être ressemble-til à quelq'un qui est passé dans notre vie et qui a touché des points sensibles et par lesquels on les transmet dans notre écriture.
Mais, j'avoue que si , par exemple, j'aime les histoires noires, j'ai intérêt à découvrir le pourquoi. Il y a certainenment une raison, outre le fait de " J'aime ca et c'est tout "
@ClaudeL : C'est réagir, mais c'est aussi fuir. Exactement ce que tous ses personnages faisaient en face de l'étrange, de l'imprévu, etc.
@Pierre : En effet, tous nos personnages ne nous ressemblent pas. Mais je pense qu'il faut se demander d'où ils sortent. Parce que des fois ça permet d'expliquer pourquoi ils se rebellent ou sonnent faux.
Et oui, quand on aime le noir ou l'horreur, on est aussi ben de savoir pourquoi! ;p
Ah ! là, là, là. Ton texte me touche beaucoup, beaucoup. Je vais le relire (souvent) pour bien en comprendre toute l'étendue. J'ai (souvent) tendance à écrire pour me défouler - je te dis pas la lettre de bêtises que j'ai écrite au Bon Dieu, il y a quelques tempsk parce que ça allait mal (soir de pleine lune, sûrement ;o)
C'est drôle, parce que je croyais que justement, il fallait écrire selon les émotions que l'on percevait. Merci Gen. Ton texte remet bien des choses en perspective.
D'après moi, écrire est bel et bien une forme de thérapie (entre autres, par la sublimation) mais comme bien d'autres petits gestes peuvent l'être. Sauf que nos écrits, en principe, sont produits pour devenir publics. En ce sens, ils parlent de nous, et souvent, malgré nous.
??? Argggg! :D
@Lucille : Oui, il faut écrire selon les émotions que tu perçois... si tu les perçois justement. Des fois, je pense qu'il faut analyser le "pourquoi" de ces émotions... et être francs envers nous même. Ne t'es-t-il jamais arrivée de te sentir coupable de ressentir de la joie ou du soulagement au moment où tu aurais "dû" être triste? C'est dans ce temps-là que l'auto-analyse s'impose... pour pouvoir la récupérer un jour.
Les textes écrits sous le coup de l'émotion sont excellents à mettre dans la tête ou la bouche d'un personnage, mais je pense que pour bâtir une histoire complexe, il faut savoir creuser plus loin.
@Karuna : En effet, c'est parce qu'ils parlent parfois de nous malgré nous que je dis qu'on est mieux de bien se connaître et d'avoir fait la thérapie avant! lol! ;)
@Lucille : J'ajoute qu'on m'a reprochée d'être trop cartésienne par contre ;p Et ça m'a pas secouée du tout! lolol!
Gen. ça prend des cartésiens en ce bas monde pour ramener les irrationnels à l'ordre catégorie dont je suis ;o)
oups... à l'ordre (catégorie dont je suis ;o)
@Lucille : En effet. Et ça prend des irrationnels pour forcer les cartésiens à lâcher leur fou! ;p
Écrire peut être une thérapie. Il y a des écrivains en bonne santé mentale, d'autres en mauvaise santé mentale et je ne suis pas certaine que les oeuvres de celui en bonne santé mentale soient plus intéressantes que celle de celui qui ne l'est pas. Des livres différents pour des lecteurs différents. Écrire fait du bien ou bien fait souffrir. Là, encore, pas de règles.
Il y a des écrivains ordonnés, pragmatiques et d'autres qui lâchent leur fou.
"J'étais un adolescent un peu torturé et c'est une des premières raisons qui m'ont fait écrire" dira Michel Tremblay.
Il ne faut pas être fou pour écrire, mais parfois, ça aide. On a dit la même chose des grands peintres. L'art exorciserait la folie. Tout un sujet que vous nous présentez là, Gen et juste avant Noël en plus! ;o)
@Femme libre : Je me suis peut-être mal exprimée... oui, l'art peut être une thérapie, mais à trop rechercher la thérapie dans l'écriture, pas sûre qu'on écrit quoique ce soit de publiable. Faut ensuite retravailler ce matériel brut.
De même, à vouloir nier l'aspect catharcique (oups, plus sûre de l'orthographe) de l'écriture, on risque de mettre de nous-même dans nos écrits à notre insu et d'y être confronté par la suite.
Bref, faut se connaître soi-même et être capable de naviguer entre l'écriture qui vient des tripes et celle qui vient de la tête. J'pense ;)
Mais pourquoi donc ne faudrait-il pas mettre de nous-même dans l'écriture? Quel mal y-a-t-il à se livrer, à se mettre à nu, à se saigner sur les mots, à y étendre ses trippes, à partager ses bonheurs et ses douleurs? Écrire sur commande, c'est une chose, écrire par passion, plaisir, torture, besoin, c'est autre chose. La peur de rendre des comptes, d'être confronté à ce que notre écriture révèle de nous à nous et aux autres n'est pas la peur de tous les écrivains. Il n'y a pas vraiment de compte à rendre. Et si cette peur est omniprésente chez l'un, il y a toujours la possibilité d'utiliser un pseudonyme. L'écriture doit être libre, souple, folle, comme un torrent qui déferle. Je suis persuadée que des écrivains écrivent sans plan. Certains disent que les personnages et les situations les ont menés dans des chemins dont ils n'avaient aucune idée au départ, ils se sont laissé aller, guidés par... l'inspiration? Le besoin de dire? Le plaisir? La douleur? Qu'est-ce qui motive l'écriture? Autant d'auteurs, autant de réponses.
@Femme libre : Non, il n'y a pas de mal à écrire avec nos tripes. Évidemment, c'est cette écriture-là qui est un besoin! Oui, il y a des écrivains qui écrivent sans plan, qui se laissent porter par les personnages : mais ils l'avouent assez facilement : ensuite ils ont beaucoup de retravail à faire.
Ce dont je vous parle ici, c'est du récit que vous voulez publier. Celui-là, il faut le relire avec sa tête. L'analyser. Et S'analyser.
Comme vous dites : qu'est-ce qui nous motive à écrire? Autant d'écrivains, autant de réponse.
Mais vous êtes mieux de connaître la réponse avant que le bouquin soit sur les rayons!
Et non, être confrontés à ses motivations, ça ne fait pas peur à tous les écrivains. Ça ne me fait plus peur maintenant, parce que je sais pourquoi j'écris. Mais j'en connais que ça terrifie. D'autant plus qu'ils ne l'avoueraient pas!
Enregistrer un commentaire