mercredi 11 juillet 2018

Comment ne pas réécrire des histoires (1)

Dans la lignée de "Comment ne pas écrire des histoires", voici mon apport au monde littéraire : "Comment ne pas réécrire des histoires", première partie (parce que je sens qu'il y en aura d'autres).

Ne commencez pas la réécriture par la traque aux "verbes faibles" et aux "mots ternes" et aux autres "dix mots à banir à jamais de vos textes". 

Si vous avez écrit un texte, ça veut dire que vous savez probablement écrire de manière minimalement intelligible. Par contre, si c'est votre premier texte, vous n'avez probablement aucune notion (ou très peu de notions) de schéma narratif, de rythme, d'arc psychologique des personnages, de telling, de narration et de cohérence interne.

Bref, ça ne vous donne rien de transformer "ses grandes jambes étaient dans le chemin" par "ses interminables jambes demeuraient dans le passage".

Premièrement, vous perdez votre temps : si ça se trouve, une fois les erreurs de fond corrigées, votre personnage n'aura plus de jambes du tout! (Ben quoi? En SFF, tout peut arriver!)

Deuxièmement, vous risquez de rendre vos idées inintelligibles pour votre premier lecteur/ coach/ directeur littéraire, qui ne pourra alors plus vous expliquer où est-ce que vous avez un problème de schéma narratif, de rythme, d'arc psychologique des personnages, de telling, de narration et de cohérence interne.

Selon mon expérience, quand un texte a besoin d'être retravaillé, c'est le fond qui souffre le plus, pas la forme. La forme, ça se polit en dernier, une fois que le fond est solide. Vous ne repeindriez pas un mur moisi qui menace de s'effondrer, non? Alors pourquoi polir (et sur-polir) un texte dont la structure est chambranlante?

Et, surtout, pourquoi tous les sites sur l'écriture parlent des mots à éviter ou à bannir et non pas du schéma narratif et du reste?

5 commentaires:

Alain a dit…

Dans la réponse à ta dernière question se trouve la différence entre être utile et faire semblant d'être utile. Conseiller aux gens d'éliminer leurs verbes être, c'est pas compliqué... mais ça ne rendra jamais un mauvais texte intéressant.

Expliquer comment travailler le fond d'un texte constitue un défi majeur, qui demande à la fois une réelle maîtrise du sujet et la volonté de s'investir dans un processus pédagogique. C'est plus facile de se montrer "pro" en prodiguant des conseils simples à suivre mais sans réelle portée.

Prospéryne a dit…

Ce billet est vraiment pertinent...

Il y en aura d'autres? :D

Pascal Raud a dit…

Je suis entièrement d'accord avec tout ça. Modifier l'écriture d'un texte sans avoir d'abord travaillé la structure, les persos, etc., c'est comme tenter de soigner un arbre malade en ne s'occupant que des feuilles sans vérifier les racines.

Gen a dit…

@Alain : J'aime bien cette distinction entre "être utile" et "faire semblant de". Et oui, c'est à peu près impossible d'expliquer à quelqu'un comment retravailler un texte sans l'avoir lu.

@Prospéryne : On verra bien! (Ça dépendra d'à quel point mes expériences de dir litt et de mentore seront mauvaises je présume! hihihihi!)

@Pascal : Belle analogie!

Prospéryne a dit…

Je n'ose pas te souhaiter de dirlit atroce à faire, mais... des billets dans ce genre, je dois avouer que ce serait très instructif! ;)