jeudi 14 mai 2015

Démarche artistique

La première fois que j'ai eu à remplir une demande de bourse, l'un des documents à fournir m'a laissée perplexe. En effet, en plus de remettre mon cv, la liste de mes publications, des exemples de mes écrits et un nombre déraisonnable de formulaires, je devais expliquer ma démarche artistique. En une page maximum.

Une page, ça me semblait long. Et, en même temps, je me doutais que la réponse honnête "j'écris les histoires qui me font tripper en commençant par le début et en essayant de me rendre jusqu'à la fin" ne serait sans doute pas saluée pour sa concision.

Je m'étais donc assise devant la liste de mes publications (c'était en 2011, alors elle était pas longue comparée à ce que c'est maintenant) et j'avais essayé de trouver un fil conducteur à mes textes. Quelque chose qui me permettrait de bricoler un semblant d'explication, de m'inventer une pseudo démarche qui paraîtrait bien...

Mais qu'est-ce qui pouvait bien unir "Ce qui reste de l'ange", "Hanaken, la lignée du sabre" et "Trois coups l'annoncent"?

Au bout de quelques heures, j'avais eu une illumination. Le conflit, voilà ce qui unissait mes textes. Les guerres, les conflits de loyauté, les affrontements entre la loi et la raison, la faute et la rédemption...

J'avais donc écrit texte joliment tourné où j'expliquais que ma démarche artistique se basait sur la notion de conflit. Que c'était des conflits qui m'inspiraient mes histoires et leur conféraient une structure. Enfin, le jury avait dû trouver ça original et cohérent, car j'ai reçu une bourse.

Puis les années (enfin, les mois) ont passé, les textes se sont accumulés.

Et j'ai fini par me rendre compte d'un curieux phénomène.

Je ne sais pas si la réflexion sur ma démarche m'a permis de systématiser quelque chose que je faisais inconsciemment ou si mon inconscient s'est nourri de cette réflexion pour affiner ses processus de création, mais depuis ce temps-là, je travaille effectivement constamment à partir de la notion de conflit.

Si je fouille un peu, je vois que ce sont des conflits (réels ou présumés) qui m'inspirent mes idées. Et quand je réécris un texte, c'est souvent afin de plus clair les conflits vécus par les personnages, qui servent souvent de fil conducteur.

Étrange non? J'essaie encore de comprendre le phénomène.

Et vous, votre démarche artistique (réelle ou supposée pour les besoins des demandes de subvention), ce serait quoi?

8 commentaires:

M a dit…

Moi je me suis aperçu que c'est souvent les lieux qui me viennent en premier et qui me stimulent... Je table donc là-dessus, non sans succès.

Unknown a dit…

Moi, c'est la question de l'identité qui revient dans pas mal tout ce que j'écris.

Daniel Sernine a dit…

Hmm, ma démarche artistique. Je me dandine?
Je parie que vous ne m'avez pas vu souvent me dandiner... :O/

Gen a dit…

@M : En effet, tu as beaucoup travaillé avec les lieux dernièrement. :) Est-ce que c'était conscient au départ ou est-ce que ça l'est devenu?

@Pierre-Luc : L'identité? Qu'est-ce que tu veux dire? Tes personnages recherchent leur identité ou..? (je vois pas ce que ce serait d'autre)

@Daniel : Lololol! Bon, moi qui espérait que l'absence de bébé dans ce billet générerait une discussion sérieuse, c'est raté! :p (Cela dit, j'aimerais lire la description de ton dandinement dans tes demandes de bourse! lol!)

Claude Lamarche a dit…

Je n'ai rédigé de démarche artistique que pour des artistes peintres, mais si j'avais à écrire sur la mienne, je parlerais de tranches de vie et relations entre les personnages.
Mais je ne crois pas que ce serait suffisant. Suis pas douée pour les demandes de subventions. Jamais réussi. Mon père était champion.
Bonne chance pour la tienne.

Gen a dit…

Oh, je ne suis pas en train de remplir des demandes!!! (avec la puce, j'ai même un projet déjà subventionné qui est en retard!) Je suis juste en réflexion de réécriture! ;)

Nomadesse a dit…

Ah ah, moi aussi, ça m'a fait réfléchir en masse cette question-là et j'ai eu aussi une révélation. Je travaille sur les "lignes grises". Ce qui nous paraît répréhensible à première vue, mais que finalement, c'est drôle, en lisant l'histoire le lecteur est d'accord avec la situation. Sur les petits préjugés qu'on entretient sans s'en apercevoir, mais qui dans un livre peuvent empêcher le personnage d'avancer.

En gros, j'écris sur des personnages qui croisent des lignes grises et qui vont devoir changer pour passer au travers. Ils changent par compassion, par amour, par désir, parce qu'ils n'ont pas le choix pour survivre. Mais c'est plus qu'un changement: c'est une mutation. C'est ça qui m'intéresse.

Je sais que mon histoire est finie quand le personnage est en paix avec sa nouvelle situation. Alors je le laisse, car je n'ai plus rien à ajouter.

Gen a dit…

Intéressant cette notion de lignes grises. Pour avoir lu "La pomme de Justine", je comprends tout à fait ce que tu veux dire! :)