mercredi 15 mai 2013

Science-fiction, fantastique, fantasy et styles littéraires

On le sait tous, pour l'avoir entendu répéter ad nauseam, le principal reproche qui est fait aux littératures dites "de l'imaginaire" (science-fiction, fantastique, fantasy ou SFFF pour les intimes), c'est qu'elles ne sont pas de la "vraie" littérature, qu'elles manquent de sérieux et de style.

Or, s'il y a une chose que j'ai réalisé dernièrement, c'est qu'il est, à mon sens, beaucoup plus facile de faire des expérimentations stylistiques en SFFF qu'en littérature réaliste.

D'ailleurs, si je regarde les textes de SFFF que j'ai écrit, ce sont tous des exercices de style : avec Le Chasseur, je raconte une histoire sans faire de référence visuelle; dans Ce qui reste de l'ange, j'emprunte le point de vue d'un personnage qui vit plusieurs époques en même temps; L'enrouleur de temps est "montée" à l'envers, artifice expliqué par un machin technologique; dans La Maillarde, je reprends le ton oral des contes médiévaux... exercice poussé encore plus loin avec De dragonis gesta! Finalement, dans Trou noir de mémoire, que vous lirez bientôt, j'utilise la magie comme excuse pour un autre exercice stylistique...

Et je me souviens très bien que le premier livre dont j'ai remarqué le style, c'était Chroniques du pays des Mères d'Élisabeth Vonarburg. En effet, dans ce monde où les hommes ont pratiquement disparu, le masculin ne l'emportait plus, grammaticalement, sur le féminin.

Évidemment, tous ces exercices de style seraient également possibles en littérature générale, mais ils seraient difficilement justifiables (le style du Pays des Mères prendrait soudain un aspect de féminisme un peu extrême). Cependant, puisque, en SFFF, on modifie déjà la réalité, il est très facile de tordre un peu la langue, ne serait-ce qu'au moyen de néologismes, pour lui faire refléter de nouveaux concepts, des ambiances exotiques, des sociétés étranges...

Et c'est un jeu dont je ne me lasse pas, autant comme lectrice que comme écrivaine! :)

9 commentaires:

Prospéryne a dit…

Brillante observation Geneviève! Je n'y avais pas pensé, mais c'est vrai.

Hélène a dit…

C'est juste. Ce que j'écris depuis un bout de temps m'emmène aussi à développer un style qui est propre à mon univers, dans des perceptions sensorielles impossibles pour l'humain. C'est ce genre d'exemple qui me fait dire "wow" en lisant une livre de SFFF. Je pense qu'il y a des gens qui ne le verront jamais comme ça, ou bien que ça ne touche pas du tout, c'est triste!

Gen a dit…

@Prospéryne : Ça m'a frappée alors que je regardais la liste de mes publications.

@Hélène : Il y a énormément de gens qui ne semblent pas du tout touchés par le style d'un auteur, malheureusement.

Sébastien Chartrand a dit…

Effectivement, il y a tant d'exercices de styles à faire... autant en narration (je pense à cette nouvelle de la Grande Dame rédigée à la seconde personne du singulier, ce qui est fort rare mais combien efficace dans ce cas précis), au niveau temporel (je pense à Tyranaël-1), au niveau perceptif (je cherche depuis des mois une façon de décrire ma synesthésie et c'est forcément la SF qui va me donner la solution), au niveau stylistique (Path Othep est assez surprenant, ou Espoir-du-Cerf)... Certes, la littérature générale a également ses belles expériences mais les genres d'imaginaire, par définition, offrent une sacrée opportunité.

Gen a dit…

@Sébastien : En effet! :)

Isabelle Simard a dit…

Dans les faits, ce que j'ai remarqué des lecteurs de lectures contemporaines, c'est qu'ils sont souvent des personnes terre-à-terre qui ont absolument besoin d'un ancrage dans le monde réel pour s'approprié l'histoire. Ils ont besoin de s'accrocher à du connu que ce soit une époque, un pan d'histoire, un bout de pays.

Luc Dagenais a dit…

@Seb: T'es synesthète toi? Oooh, faut qu'on se parle. Enfin, j'aimerais ça qu'on en discutes, si tu veux, bien sûr. ;)

Gen a dit…

@Isabelle : En effet, les lecteurs de "réalisme" sont souvent très terre-à-terre... mais en même temps, ce sont souvent eux qui crient au génie quand leur auteur de littérature "blanche" utilise soudain quelques éléments de SFFF.

@Luc : Je me disais aussi qu'il faudrait cuisiner Sébastien là-dessus ;) (j'ai connu une fille qui était graphème-couleur quand j'étais au cégep et des fois elle nous expliquait ce qu'elle voyait et c'était assez drôle! ;)

Sébastien Chartrand a dit…

@ Luc et Gen: je pensais que pas mal tout le monde était au courant :P on jasera si vous voulez !