mercredi 24 février 2010

Journalisme et format électronique

Ces temps-ci, les journaux parlent beaucoup, et avec moults larmoiements, des difficultés qu'ils rencontrent dans leurs tentatives pour s'adapter à l'omniprésence d'Internet. Leurs plate-formes web ne rapportent pas, leurs revenus de publicité sont en baisse, leurs abonnements en format papier diminuent, ils voient avec terreur les lecteurs de livres électroniques connaître une hausse de popularité et ils s'inquiètent du nouveau Ipad.

Deux problèmes sont en train de tuer les journaux. De un, comme beaucoup d'entreprise, ils ont pris le virage électronique en retard. Plus personne ne veut payer pour obtenir de l'information en ligne : il y a trop de moyens de l'avoir gratuitement (surtout si on lit l'anglais). Donc la transposition de leur modèle d'affaires habituel, des abonnés qui paient pour avoir accès à l'information, ne tient plus.

Le deuxième problème est celui du contenu. De nos jours, n'importe qui (même moi) peut faire des critiques de resto, de livre, de film sur son blogue. Avec une bonne plume, vous pouvez même vous improviser chroniqueur et faire des billets d'humeur ou d'opinion (comme celui-ci). Les nouvelles nationales ou internationales sont disponibles en temps réel un peu partout. On n'a plus besoin des journaux pour ce genre de trucs.

Par contre, ce que Monsieur et Madame Tout-le-monde ne peut pas faire, par manque de temps ou de formation, ce sont des longs dossiers fouillés, du journalisme d'enquête, des analyses approfondies. Du "vrai" journalisme, quoi. Or, dans quoi les journaux coupent-ils en cas de difficulté financière? Dans le journalisme d'enquête. Parce que ça immobilise un journaliste pendant plusieurs jours. Parfois, faut même qu'il se déplace! Ça coûte trop cher.

Je me suis demandé un temps pourquoi les journaux, devant la montée des formats électroniques, se tiraient ainsi dans les pieds alors que les écrivains, eux, regardent l'avenir avec calme et curiosité. Et puis, je crois que j'ai trouvé la réponse.

Pour les écrivains, hormis quelques chanceux, écrire est une vocation ou un loisir qui rapporte parfois quelques pinottes. Pour les journalistes, écrire est un métier et un métier qui, jusqu'à récemment, payait bien. Ils travaillaient au sein de grosses machines qui ont fait beaucoup d'argent pendant des années et qui, tout d'un coup, ne savent plus quoi faire devant la chute de leurs profits.

Sauf que si, comme on nous le répète, le journalisme est au service du public, comment se fait-il que les journaux ne soient pas des organismes à but non lucratifs?

Avant que ce ne soit trop tard, ne faudrait-il pas convertir toute la presse pour en faire une machine dont les revenus ne servent qu'à alimenter les dépenses et les investissements dans ses infracstrutures? À partir du moment où vous ne voulez pas dégager sans cesse un surplus, où vous ne gonflez pas les salaires des "chroniqueurs vedettes", où vous ne payez pas un PDG déjà multimillionnaire, où vous n'avez pas d'actionnaires qui attendent des dividendes... bref, à partir du moment où le journalisme redeviendrait un service et non une industrie, à partir du moment où les articles seraient publiés au fur et à mesure de leur production et non en fonction d'une date de tombée qui force à faire du remplissage, le journalisme ne serait-il pas à nouveau viable et utile?

J'en ai fumé du bon ou ça fait du sens?

11 commentaires:

Joe G a dit…

Ça fait du sens sauf sur quelques points à mon avis.

Baissé le salaire des "chroniqueurs vedettes" n'est pas une solution. Je suis d'avis que si ce qu'ils rapportent étaient non proportionel à ce qu'is coûtent, ils se feraient donner leur 4%.

Puis que le salaire du PDG en calculé indépendament du journal. Bien qu'il est influent sur la direction du journal et qu'il peu s'agir d'un problème, il n'est pas directement responsable si le journal est déficitaire.

En bout de ligne c'est le modèle de revenu au complet qui est à revoir et non les dépenses puisque la pub et les annonces classé ne fontionnent plus.

Petite note, le JdM ainsi que La Presse ne sont pas dans le rouge aux dernières nouvelles.

Je te recommande de jeter un coup au blogue de Steve Faguy http://blog.fagstein.com
puis au magazine le Trente http://trente.ca/

Et pendant que j'y suis, coté comics c'est un casse-tête aussi. ;)
Au minimum les écrivains semblent bénificié de pouvoir sauté d'un media à l'autre.

ClaudeL a dit…

Tu me fais penser à quelqu'une que je connais: une opinion sur tout. Regardes-tu Les Ex? Commentes-tu les opnions des spécialistes? Vous m'épatez (toi et la quelqu'une), je n'ai pas le quart de la moitié de vos idées. Et une n'attend pas l'autre. Le pire, c'est que justement ça toujours bien du bon sens vos réflexions-éditoriaux.

Gen a dit…

@ClaudeL : Je regarde pas la télé, j'écoute pas la radio. Je lis les journaux gratuits sur le web... et je parle ensuite ici de ce qui m'interpelle, parce que mes collègues de bureau sont occupées à commenter Star Académie ou l'autre dernière niaiserie en date... ou alors elles répètent les commentaires parfois biaisés des "chroniqueurs vedettes" qui sont "don éduqués et brillants"!

Je me force à tous les jours à me creuser le citron et à poser un regard critique sur le monde... et sur moi. J'pense qu'à la longue, les idées viennent plus facilement.

@Joe G. : Je suis sûre qu'il y a des chroniqueurs vedettes qui coûtent plus qu'ils ne rapportent. Mais bon, les gens sont habitués de lire des analyses de hockey faites par Tremblay, alors on paye Tremblay.

Le problème avec le PDG, c'est qu'on le paye parce qu'il possède le journal. Il n'y fait plus aucun travail. C'est ce modèle de capitalisme qui ne marche plus. La classe possédante qui se taille la part du lion dans les revenus sans produire quoique ce soit, l'industrie de presse ne peut plus la soutenir.

Et oui, Joe, La Presse et le JDM sont dans le rouge. D'ailleurs, les journalistes du JDM sont en lock-out. Le journal publie des trucs faits par pigistes sous-payés, ainsi que des communiqués de presse et du fil de presse présentement. Les vrais journalistes publient là : http://ruefrontenac.com/

François Bélisle a dit…

Bon... Je suis allé me défouler chez moi.

Gen a dit…

@François : Tu aurais été le bienvenu ici, mais au vu de la longueur de ton billet, tu as bien fait : il sera plus lisible ainsi. :)

J'invite les autres à aller faire un tour chez François.

Joe G a dit…

Je suis d'accord que le PDG est un problème sur la rémunération globale, et ce dans la majorité des industries. Mais son salaire est pris à même les revenues généré;
En cas de déficite il ne fait pas parti du problème. Techniquement il ne coûte rien non?

Sinon les employées racheterais le media lors de la fermeture. Plusieurs ont tenté l'experience au cours des dernières années sans succès. Mais je partage ton avis que Canwest, Transcontinental, Quebecor et co. font plus parti du problème que de la solution.

Je t'accordes que les revenus sont en baisse pour le JdM et La Presse, mais les deux demeurent profitibles.
Pierre Karl Peladeau l'a mentionné à plusieurs reprise en 2009.
Pour La Presse, c'est ce qui était ressortir des dernières négoacitaions em décembre dernier.
Aucune idée pour The Gazette et de mémoire Le Devoir subsiste en partit par subvention.
Pour ruefrontenac.com , un excellent moyen de pression. Je trouve un peu ridicule que le syndicat insiste pour que les employés fassent du piquetage en plus. À mon avis le conflit vas se terminé malheureusement comme à Quebec.

Gen a dit…

@Joe : Heu... tu penses réellement que le PDG accepte que sa rémunération diminue en cas de mauvaise année? No way. Et profitable à court terme ne veut pas dire viable à long terme.

Pour le reste... va voir le billet de François.

Présentement, les grosses machines de presse étouffent toutes les autres. Les petits journaux ne peuvent pas survivre. De là les échecs de rachat.

François Bélisle a dit…

Je ne remets pas en question ton hospitalité. Mais j'apportais effectivement trop de lettres avec moi...

Et si je peux ajouter: les ventes du JdM ont augmenté. Comme quoi ce ne sont pas seulement les entreprises qui sont les «méchantes». Il n'y a pas d'argent dans ce débat, mais bien des gens qui s'en crissent totalement du lock-out.

Joe G a dit…

Je suis d'accord avec François et toi, ce que Quebecor à fait avec la création de l'agence QMI c'est dégeulace et suis d'avis que ça n'iras pas en s'amiliorant . Les ventes du JdM ont même augmenté en 2009!

Et pour le salaire du PDG, ce que je dit c'est que Quebecor, par exemple, est une société par action, pas le JdM directment.
Si le journal est dans la rouge, il n'a pas une cenne à envoyé au palié plus haut. Ok je convient que PKP doit avoir son nom quelque part dans la liste de paie du JdM à quelque part mais ceci ne contrevient pas au problème que les revenue de la presse écrite sont en baisse ce qui m'amène à dire qu'une presse indépendante n'est pas La solution.

Plusieurs grande ville sont rendu qu'avec un seul quotidiens. Comme Boston et San Fransisco. Les gros ferment aussi ce qui me porte à dire que le concept que les gros bouffe les petites est définitivement vrais au Québec, ça n'explique pas la baisse globale de tout les medias imprimés.

Gen a dit…

@François : Pas de trouble ;)

Pour les ventes du JdM... Comme je disais à ClaudeL, j'ai ouvert un blogue parce que j'étais fatiguée d'entendre mes collègues jaser des téléréalités, des potins, du score du hockey (savez-vous qu'il y a d'autres sports dans l'univers?), des maillots des patineurs (sans avoir vu leur performance) et des "drames humains". Ils lisent tous religieusement le JdM. Et ils savent même pas que les journalistes sont en lock-out. C'est pas écrit dans le journal.

Les gens se crissent généralement de se faire remplir la tête de bouette. Quand ils comprennent tout ce qu'ils lisent sans se poser de question, ils se sentent intelligents.

Gen a dit…

@Joe : Les revenus de tous les médias sont en baisse, essentiellement parce que l'éclatement des moyens de diffusion amène une dispersion du public et une division des revenus de publicité.

Il faudrait donc changer la source de revenus. Revenir à l'époque où les abonnements faisaient vivre le journal. Je serais prête à payer pour des articles de fond. Des vrais, pas juste des titres accrocheurs.

Faudrait une plate-forme mixte (comme certains journaux américains, et rentables, ont déjà) : des informations d'heure en heure gratuite et des forfaits (abonnement à l'année, mensuel, coût par article) pour les articles fouillés.

Ce serait long avant de se bâtir une base de lecteurs, c'est sûr, mais ça finirait par marcher je crois. Surtout si on élimine la maudite pub et les articles complaisants qui l'accompagne!